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PLUTUS.

Et mon aigle ?

CARION.

C’est moi !

PLUTUS.

Hébé ? Ganymède ?

MERCURE, lui présentant Chrémyle.

Les voici !

PLUTUS.

Ils sont bien laids !

CARION, à part.

Il voit double, et pourtant il voit clair.

MERCURE.

Allons, en route !

CHRÉMYLE, à Plutus.

Si je te fais roi des dieux, tu m’en récompenseras ?

PLUTUS.

Oui, je changerai en or tes blés, tes arbres, ta femme, tes enfans, tes esclaves, ton chien et toi-même !

CHRÉMYLE.

Eh ! non pas ! Dégrise-toi ! Je veux que nous vivions et que nous puissions vivre !

PLUTUS.

Dépêchons-nous !

MERCURE.

Allez prendre des masses, des pics, des leviers, des cordes, pour renverser et briser la statue de Jupiter.

CARION.

Oui, allons ! partons ! (ils sortent.)

CHRÉMYLE, à part.

O Jupiter protecteur, pardonne-moi ce que je vais faire contre toi ! (Il sort.) — On entend les cris et les clameurs de l’émeute contre Jupiter. Le temps devient sombre tout à coup.)


SCÈNE III.


MYRTO.

Jamais,… jamais,… jamais ! Je ne le reverrai jamais ! Cette parole-là fait mourir, je veux la dire sans cesse ! (Elle s’appuie contre la fontaine et cache son visage. — Un coup de tonnerre. — Elle regarde avec surprise autour d’elle. — l’obscurité est augmentée.) Quel orage soudain ! Rien ne l’annonçait dans le ciel ni sur la terre. Les pleurs ont donc brûlé mes yeux, que je ne vois plus la clarté du soleil ? (un second coup de tonnerre et bruit du vent qui se déchaine.) O Euménides que je viens d’implorer, est-ce là votre réponse ? Elle est sinistre et de mauvais présage ! (Tempête.) Étrange tempête qui semble bouleverser la terre et qui ne trouble pas la paix de ce lieu-ci ! Hélas ! la mer doit être furieuse, et il est là, lui ! Peut-être en ce moment, pendant que les cruelles divinités protègent ici