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Mourabetin), sous les ordres de Yousef-ben-Taclifin, Zenaga de la tribu des Lamtouna[1], la fondation d’un empire qui comprenait la Berbérie, le Sahara, les îles Baléares, la Sicile, attestent leur splendeur à jamais éclipsée.

Quant à la rive gauche, la rive des noirs, les divisions sont encore plus nombreuses, les races plus variées, les progrès de la civilisation plus inégaux, les constitutions politiques plus diverses. Chaque pays de la rive des noirs, chacune des races qui l’habitent exigeraient, pour être connus, des développemens qui dépasseraient le cadre que nous nous sommes tracé. Nous n’entrerons que dans les détails indispensables. — Le Cayor, le Oualo, le Fouta sénégalais, le Goy et le Bondou, tels sont les principaux états entre lesquels se subdivisent les immenses régions du bassin méridional du grand fleuve. En ajoutant à ces noms ceux du Djiolof, qui touche le Fouta, le Oualo et le Cayor, du Sin, du Salum et du Baol, pays qui, par leur constitution géologique et géographique, par les races qui les habitent, semblent le prolongement du Cayor, et qui d’ailleurs subissent aujourd’hui notre influence politique, nous aurons désigné les régions les plus importantes du Sénégal que couvre la race noire. Sur tous les peuples de cette race, dans un avenir plus ou moins prochain, notre civilisation est appelée à réagir définitivement, soit par la force matérielle, soit par la force plus grande des principes qu’elle représente. Quelques-uns ou plutôt tous déjà ont subi cette action, mais à des degrés bien divers, et, chose étrange au premier abord, c’est surtout, si nous en exceptons Saint-Louis et son territoire restreint, c’est surtout parmi les populations extrêmes du Goy et du Gadiaga, c’est-à-dire celles des environs de Bakel et du haut du fleuve, que notre présence et notre contact ont imprimé les plus fortes traces. Le Cayor, dans le territoire duquel est enclavée l’ile de Saint-Louis, est entré le dernier dans le courant de nos idées, et il n’a pas fallu moins de huit expéditions successives, conduites avec la plus grande vigueur, pour lui imposer en 1861 un traité de paix constatant que sa résistance était brisée.

La race oualo forme l’élément essentiel des populations qui habitent le Djiolof, le Oualo, le Cayor, le Sin, le Salum, etc. Les braks (rois) du Oualo, les damels (rois) du Cayor, les chefs des autres pays que nous avons cités, reconnaissant la suprématie féodale du bour-djiolof (roi du Djiolof)[2], s’inclinent devant les traditions de sa puissance, aujourd’hui déchue : traditions qui montrent, dans un temps peu reculé d’ailleurs, le bour-djiolof comme le chef su-

  1. Léon Faidherbe, Notice sur le Sénégal, p. 20.
  2. « Il est encore admis que si les rois du Sin, du Baol, du Cayor et du Oualo se trouvaient en présence du bour-djiolof, celui-ci aurait seul le droit de s’asseoir sur un siège élevé. » (F. Carrère, la Sénégambie française.)