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produisent des vins semblables à ceux d’Espagne, l’olivier, le tabac prospèrent dans les vallées de Santa-Barbara, et dans les comtés de San-Mateo on voit naître de vastes plantations de mûriers. L’or n’a point été trouvé dans ces montagnes, la pioche des mineurs ne les a point dévastées ; aussi les vallons du Coast-Range sont-ils restés de charmans séjours, où s’élèvent peu à peu de somptueuses demeures, retraites choisies des opulens colons de la nouvelle terre.

La chaîne de la Sierra-Nevada offre un tout autre aspect : elle marque le trait orographique principal de toute la contrée ; c’est en effet le soulèvement de cette montagne qui a donné à toute la région le mouvement général du relief actuel. La Nevada est un élément de cette grande arête montagneuse qui tout le long du Pacifique borde le continent des deux Amériques. La structure générale de la sierra est celle d’un grand plan incliné s’élevant lentement au-dessus des plaines du San-Joaquin et du Sacramento, et se terminant de l’autre côté, vers l’est, par une immense falaise haute de 1,800 mètres, et coupée presque à pic sur toute la longueur de la chaîne. Quelques-unes des plus hautes crêtes qui terminent ce talus abrupt de la montagne atteignent à 3,000 ou 3,500 mètres de hauteur au-dessus du niveau de la mer. L’altitude moyenne de la chaîne entière peut être évaluée à 2,800 mètres. Cette hauteur est inférieure à celle qui, sous ces latitudes, correspond aux neiges perpétuelles, Le nom de Nevada ne doit donc pas donner l’idée d’une haute chaîne couronnée de glaciers ; on ne peut l’expliquer que par les grandes accumulations de neiges qui tous les ans obstruent les hautes vallées. Ces neiges, précieuse source des mille rivières qui descendent de la chaîne, sont régulièrement ramenées tous les hivers par une cause météorologique constante : la prédominance dans ces latitudes de vents réguliers venant du sud-ouest, lesquels sont là contre-partie des vents alizés. Si on consulte en effet les registres que quelques amis des sciences ont déjà ouverts à San-Francisco, on voit que le vent souffle du côté de la mer des régions sud-sud-ouest de l’horizon deux cent cinquante jours sur les trois cent soixante-cinq de l’année. Ces grands courans atmosphériques, partis des régions voisines de l’équateur, arrivent chargés de l’humidité et de la chaleur qu’ils ont recueillies dans leur long voyage à travers l’Océan. Pendant l’été, ils tempèrent la chaleur, et pendant l’hiver ils apportent aux vallées inférieures de tièdes ondées, tandis que sur les hautes montagnes ils couvrent le sol d’un épais manteau de neige.

Considérée de l’un des pics du Coast-Range, la Nevada apparaît comme une immense forêt plantée sur un amphithéâtre de collines superposées et fuyant les unes derrière les autres. Les diverses essences de bois de chêne, de hêtre, de sapin, de cèdre, se distribuent