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fait entrer les services dans des cadres rigoureux et substitué au patronage individuel, représenté par des milliers de têtes, le patronage de cet être de raison que l’on nomme tantôt un comité, tantôt un conseil ? Tel était le problème sur lequel le temps et l’expérience allaient prononcer.

Les résultats ne semblent pas jusqu’ici défavorables. Un document publié par le conseil privé et qui embrasse cinq années, de 1855 à 1859, constate que les efforts volontaires n’ont pas diminué depuis qu’a commencé la période des libéralités du trésor. Malgré le taux croissant des subventions officielles, les largesses privées occupent encore et de beaucoup le premier rang. Quelques chiffres suffiront pour marquer les distances. En 1855, les allocations du gouvernement pour construction, agrandissement, réparations et appropriation des locaux s’élevaient pour les écoles à 70,000 livres sterling en nombres ronds ; les contributions locales atteignaient 142,000 livres. En 1859, les proportions pour les mêmes services étaient de 125,000 livres à la charge de l’état et de 216,000 livres à la charge des paroisses ou provenant de dons particuliers. Les collèges entretenus et les fournitures générales, livres, cartes et appareils, offraient des balances analogues. Pour les traitemens des instituteurs et des moniteurs, les sommes présentent un plus grand écart dans les rapports. L’état en 1855 y contribuait pour 168,000 livres ; les localités et les dons privés y entraient pour 430,000 livres. En 1859, le premier des deux contingens s’élevait à 351,000 livres, le second à 560,000 livres. Les années intermédiaires reproduisent, à quelques fluctuations près, la même situation. Du dépouillement de cette comptabilité, en s’en tenant aux apparences, on peut conclure que la contribution volontaire n’a pas été mise en échec d’une manière sensible, et qu’elle a, par des augmentations parallèles, rivalisé avec l’état, au lieu de se laisser décourager par son intervention. Quelques réserves sont pourtant à faire. Pour les bâtimens, le trésor public a, en cinq ans, doublé sa somme ; les localités n’ont élevé la leur que d’un tiers. Pour les traitemens, l’état, dans la même période, va au-delà du double ; les localités se contentent d’ajouter un quart en sus. Déjà donc les deux parties ne marchent point du même pas ; le gouvernement y met plus de zèle que les paroisses, il a l’ardeur des ouvriers de la dernière heure. Remarquons en outre que les contributions locales et volontaires ont leurs racines dans les habitudes et obéissent à un mouvement d’impulsion qui n’est pas de nature à s’arrêter en un jour. Devant une rivalité naissante, les paroisses se sont piquées d’honneur ; en acceptant une assistance, elles ont prouvé qu’elles ne s’abandonnaient pas elles-mêmes. Tels sont les motifs et la mesure de la puissance de l’effort privé. Est-il à croire que les choses garderont cet équilibre,