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d’après leur ancienne constitution, protesta pour la forme, ainsi que le marquis de Maubec au nom des anciens barons. L’assemblée décida qu’il ne serait tenu aucun compte de ces protestations. Après avoir arrêté les principes qui devaient servir de base à la nouvelle constitution de la province, elle vota une adresse au roi et une autre à M. Necker, et se sépara paisiblement. Le gouvernement répondit à ces témoignages de reconnaissance en donnant la sanction royale aux propositions adoptées.

L’arrêt du conseil du 22 octobre 1788, qui contenait cette concession décisive, se composait de soixante et un articles. Les états du Dauphiné devaient être formés à l’avenir de 144 députés des trois ordres : 24 pour le clergé, 48 pour la noblesse et 72 pour le tiers-état[1]. La représentation du clergé devait se composer de 3 archevêques ou évêques, 3 commandeurs de Malte, 7 députés des églises cathédrales, 5 des églises collégiales, 2 curés propriétaires, 2 députés des abbés et prieurs, 1 député des communautés régulières d’hommes, à l’exception des ordres mendions, et 1 député des communautés régulières de filles. Pour être électeur dans l’ordre de la noblesse, il suffisait d’avoir la noblesse acquise et transmissible ; mais pour être éligible dans le même ordre, il fallait faire preuve de cent ans de noblesse et avoir la libre administration d’immeubles payant au moins 50 livres d’impositions foncières. Aucun noble ou ecclésiastique ne pouvait être admis parmi les représentans du tiers-état. Le roi devait convoquer les états tous les ans au mois de novembre ; chaque assemblée, avant de se séparer, pouvait exprimer son vœu sur le lieu où se tiendrait la suivante. Les états devaient choisir eux-mêmes leur président, mais parmi les deux premiers ordres seulement. Comme les assemblées provinciales, ils devaient élire une commission intermédiaire et deux syndics-généraux. Il n’était rien changé à leurs autres attributions.

Presque tous les historiens de la révolution ont affirmé que le Dauphiné eut alors l’honneur d’inaugurer les trois grands principes qui devaient triompher l’année suivante aux états-généraux : le doublement du tiers, la réunion des ordres et le vote par tête. C’est une erreur matérielle. Ces trois principes étaient pratiqués par les états du Languedoc depuis un temps immémorial, et le roi les avait généralisés dès 1779 par l’institution des assemblées provinciales. Les délibérations de Vizille et de Romans ne purent créer ce qui existait déjà. Les véritables différences entre l’organisation de l’assemblée

  1. Le Dauphiné étant environ le trentième de la France, le total des membres des états provinciaux, s’ils avaient été organisés partout sur les mêmes bases, aurait été de 4,000. Dans la conception première des assemblées provinciales, il devait être de 1,800. Le nombre des membres des conseils-généraux est aujourd’hui de 2,938.