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rendait par le fait les institutions si regrettées en les adaptant aux besoins nouveaux. Ses remontrances, du 1er septembre 1787, débutaient ainsi : « Sire, du sein de la douleur dont votre majesté a été pénétrée à la vue de la misère des peuples et de l’épuisement de ses finances, elle a cru ne pouvoir accorder à ses sujets un plus grand bienfait, ni se procurer à elle-même des droits mieux fondés à leur reconnaissance que de détruire une administration odieuse dans tous les temps et tombée dans un discrédit universel. Vous avez reconnu le désordre de cette administration informe et essentiellement oppressive ; l’abus a crié si fort, et de toutes parts, qu’enfin il s’est fait entendre ; on ne s’est plus occupé qu’à sauver du mécontentement général une administration plus onéreuse aux peuples que les besoins de l’état, et à l’accréditer davantage en paraissant l’abandonner : c’est dans cette vue que paraît avoir travaillé celui qui vous a proposé le nouveau plan des assemblées provinciales. Il n’était pas possible de présenter avec plus d’artifice un projet plus séduisant pour votre cœur paternel : votre majesté a ducroire que les peuples auraient une satisfaction complète ; les commissaires départis et tous leurs suppôts paraissaient dépouillés de tout. »

Le gouvernement avait envoyé au parlement, pour le faire enregistrer, l’édit général sur les assemblées provinciales ; mais il avait refusé de communiquer le règlement spécial à la province comme étant un acte d’administration non soumis à l’examen du parlement. C’est à cette omission que s’attacha le parlement de Besançon, comme celui de Bordeaux, pour refuser l’enregistrement. « Nous sommes, disait-il, dans l’impossibilité de discuter exactement le mérite de ce nouvel ordre d’administration inconnu dans la monarchie depuis treize siècles. Nous ne connaissons ni les règlemens auxquels elle doit être assujettie, ni son régime, ni ses fonctions. Ce mystère fait naître nécessairement une idée peu favorable à une innovation si importante, et qui, accordée comme un bienfait, ne pouvait être trop tôt ni trop clairement développée ; il en résulte un obstacle perpétuellement invincible à la vérification de l’édit. » Suivait un tableau de l’administration des intendans, qui n’avait été que trop vrai sous les deux derniers règnes, mais qui cessait de l’être : « Le commissaire départi du conseil exerce de fait, avec tous ses suppôts, un pouvoir énorme que la loi désavoue ; par un bouleversement de toutes les notions, les officiers-généraux commandans dans la province, les évêques qui la dirigent, les membres de votre parlement, les officiers municipaux des villes, tous réunis, n’exercent pas une autorité aussi absolue, aussi universelle, aussi redoutée qu’un seul subdélégué. Ce pouvoir arbitraire est exercé d’une manière qui répond parfaitement à sa destination ; il n’a pour