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Vesoul, Salins, Arbois, Lons-le-Saulnier, Orgelet, Pontarlier, Baume-les-Dames, Ornans, Poligny, Quingey et Saint-Claude[1].

La Franche-Comté, conquise par Louis XIV, n’avait été définitivement réunie à la couronne que par le traité de Nimègue en 1678. En 1787, il n’y avait donc pas beaucoup plus de cent ans qu’elle appartenait à la France. Elle avait joui, tant qu’elle fit partie de l’empire, d’une indépendance presque complète. Il n’en était pas de même depuis la réunion à la France. Comme l’Alsace et la Lorraine, elle payait fort peu d’impôts, 13 livres 14 sols par tête ; mais ces immunités ne la contentaient pas, et elle regrettait ses anciens privilèges. La capitulation de Dôle en 1668, signée par Louis XIV en personne, portait (article 3) que la ville de Dôle resterait la capitale de la province, qu’on y continuerait toujours l’assemblée des états, et qu’on n’en ôterait jamais le parlement et l’université. Ces promesses n’avaient pas été tenues ; les états, dont l’origine remontait aux temps les plus anciens, ne s’étaient pas réunis depuis 1666, le parlement et l’université avaient été transférés à Besançon ; un intendant ou commissaire-départi gouvernait arbitrairement la province.

Quand il s’agit d’y établir une assemblée provinciale sur le modèle des autres, les ministres eurent soin de déclarer, pour ménager les susceptibilités locales, que le roi n’entendait pas déroger aux privilèges de la province, et que, les états ayant été seulement suspendus par ses prédécesseurs, il se réservait d’en ordonner la convocation quand il le croirait utile à son service et au bien de ses sujets. Ces précautions n’empêchèrent pas l’explosion qu’on redoutait de la part de la nation séquanaise ou franc-comtoise, comme elle aimait encore à s’appeler. Il a été impossible de retrouver la liste des membres désignés par le roi pour former la première moitié de l’assemblée provinciale ; mais tout indique que cette liste a existé, du moins en projet, et que la présidence avait été dévolue à l’archevêque de Besançon, M. de Durfort, un des prélats les plus pieux et les plus respectés du royaume.

Le parlement de Besançon donna le premier le signal de la résistance[2]. Ce corps n’avait cessé, depuis la conquête, de réclamer les antiques libertés, et il s’était mis plusieurs fois en révolte ouverte contre l’autorité royale. Il garda la même attitude quand le roi

  1. Salins, Arbois, Orgelet, Ornans et Quingey ne sont plus que des chefs-lieux de canton ; Lure est devenu chef-lieu d’arrondissement. Le comté de Montbéliard, conquis en 1793, n’appartenait pas alors à la France.
  2. Je dois presque tous les documens qui m’ont servi pour la Franche-Comté à l’obligeance parfaite de M. Castan, sous-bibliothécaire de la ville de Besançon ; le vénérable bibliothécaire, M. Weiss, a bien voulu me fournir aussi quelques notes.