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dili-. » Prim est aussi d’avis, et nous en avons malheureusement fait l’épreuve, que l’on va plus aisément à Mexico en diligence qu’avec une armée de cinq mille hommes. Un des résultats de l’expédition mexicaine a été d’embrouiller notre politique du côté de Madrid. Ce n’est pas que le gouvernement espagnol nous paraisse s’être lavé des accusations de contradiction et d’inconséquence que M. Bermudez de Castro et le général Concha ont si vigoureusement portées contre lui, ce n’est pas que l’amusante lame de Tolède du général Prim tournée contre la poitrine de M. Billault soit de nature à donner de grands soucis à notre ministre-orateur, mais qu’importent les torts de l’Espagne envers nous ? Notre faute à nous a été d’encourir ces torts-là en nous compromettant dans une alliance imprudente. Ce que nous avons de mieux à faire est de laisser l’Espagne tranquille et de n’y plus penser. Après tout, si nous avons le vif sentiment des erreurs passées de notre politique mexicaine, ce n’est point pour y chercher un thème à récriminations ; mais il importe que notre politique soit rectifiée et définie le plus tôt possible. La discussion de l’adresse va en donner l’occasion. Nous ne savons que trop comment nous sommes entrés dans cette aventure ; la prudence et la sagesse seraient de savoir déjà comment on en sortira et de le dire hautement. Ce ne serait pas le moyen d’en sortir vite ou jamais que de prendre au Mexique la tâche de renverser ou d’édifier des gouvernemens.

Nous avons aussi peu de goût à tenter l’appréciation des événemens dont les États-Unis sont le théâtre. C’est toujours en effet à l’heure où ces événemens semblent à la veille de prendre un tour décisif que nous sommes replongés dans de plus grandes incertitudes. Le gouvernement de Washington conduit la guerre avec cet esprit d’indécision et de contradiction qui est le propre des états populaires lorsqu’ils sont aux prises avec ce terrible jeu. Comment ne déplorerait-on pas ces changemens de généraux que l’on destitue, comme Mac-Clellan, au lendemain d’une victoire, pour les rappeler au lendemain d’une défaite ? Il semble que le système de temporisation que l’on reprochait au général Mac-Clellan était au fond le plus conforme aux intérêts de l’Union, car, bien plus riche en ressources que la sécession, c’est elle qui est le moins usée par le temps. Au surplus, l’agression ne réussit à aucun des deux partis, et aucun ne sait rendre décisifs les résultats d’une victoire. Les confédérés, après leurs derniers succès à Bull’s Run, font une pointe sur le Maryland et la Pensylvanie. Ils échouent. Mac-Clellan les bat à Antietham ; mais il laisse Lee retrouver un abri derrière le Potomac. Burnside attaque en vain les confédérés dans leurs positions retranchées de Frederiksburg : il est repoussé en essuyant d’énormes pertes ; mais il reste une journée sur son champ de bataille, et, devant Lee victorieux, il repasse le fleuve qu’il avait à dos, et ramène tous ses canons et tous ses blessés. Il y a des deux côtés des actions de grande bravoure et de tristes carnages ; mais les intuitions, les coups de