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pas patiemment, comme lui, chaque partie de l’île, parlant la langue Islandaise et ses dialectes, et connaissant mieux que les Islandais d’aujourd’hui la vieille littérature des sagas ; mais ils s’y montrent hardis encore et s’aventurent en dehors de l’itinéraire obligé et convenu des voyageurs en Islande, qui communément croient leur tâche accomplie après l’excursion à Thingvalla et aux Geysers, comme ceux des Pyrénées après Gavarnie et le port de Venasque. Trois de ces relations anglaises ont paru récemment : celles du révérend M. Metcalfe, de M. Symington et de M. Forbes[1]. Le révérend oxonien a, comme on pense, distribué des bibles partout sur son passage ; des ruines d’églises catholiques, subsistant çà et là dans les déserts de l’Islande, ont irrité son humeur, et le lecteur est un peu bien surpris de l’entendre, du milieu des laves de l’Islande, prêcher contre le pape. — M. Symington se montre fort préoccupé des projets du gouvernement français sur l’Islande. La soirée qu’il passe chez le comte Trampe, gouverneur de l’île, est troublée profondément par la vue d’une foule de peintures et de lithographies fixées aux murs, et qui toutes parlent de la France. « Des frégates françaises viennent chaque année sur ces côtes, dit-il, avec le dessein ostensible de protéger les pêcheries. Si l’on réfléchit que la possession de l’île est une charge fort onéreuse pour le gouvernement danois, on peut croire que le gouvernement accueillerait volontiers des propositions françaises en vue d’une si profitable acquisition. Ce serait d’ailleurs pour le cabinet de Copenhague un moyen commode de reconnaître une assistance efficace dans la question des duchés. L’acquisition de l’Islande serait fort utile au gouvernement français pour former et exercer ses marins ; les pêcheries de Terre-Neuve ne sont elles-mêmes entretenues par lui que dans cette seule vue. Avec ses ports admirables, avec ses rades immenses sur la côte occidentale, qui ne gèlent pas en hiver à cause des courans, l’Islande fournirait à la France dans la Mer du Nord une station précieuse d’où ses navires menaceraient sans cesse le trafic de l’Angleterre avec l’Amérique du Nord. Elle contient des mines de soufre qui compenseraient toutes les ressources qu’offre aujourd’hui la Sicile à l’Angleterre. Elle est enfin le grand réservoir de saumons pour l’Europe entière. Les Islandais dévoués à leur pays ne regardent pas sans aversion ces tentatives de la France ; mais prendrait-on leur avis ? La négociation

  1. The Oxonian… (l’Oxonien en Islande, ou Notes d’un voyage dans cette île dans l’été de 1860), par le révérend Frédéric Metcalfe, fellow de Lincoln collège à Oxford, auteur de l’Oxonien en Norvège ; Londres 1801, 4 vol. in-8o, avec gravures. — Pen and pencil sketches… (Esquisses ou crayon et à la plume des Faeroe et d’Islande), par Andrew James Symington. Londres 1862, 1 vol. in-8o, avec gravures. — Iceland… (l’Islande, ses volcans, ses Geysers et ses glaciers), par Charles Forbes ; Londres, 1 vol. in-8o, avec gravures.