Page:Revue des Deux Mondes - 1863 - tome 43.djvu/120

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

exemple se fait plus rapidement et dans de meilleures conditions hygiéniques. Jusqu’en 1854, l’opération durait environ dix-huit heures, et pendant tout ce temps la réaction de l’acide déterminait la formation d’abondantes vapeurs d’acroléine, très incommodes, acres et insalubres. L’altération d’une partie de la matière grasse et de la glycérine occasionnait la production d’une matière goudronneuse et une déperdition assez grande. Entre cet état de choses et l’industrie graduellement perfectionnée par MM. Knab, Petit et de Milly, les différences sont très grandes : au lieu d’employer dix-huit heures, la réaction, à l’aide de doses et d’une température convenables, est tellement prompte qu’on la dit instantanée ; une demi-heure y suffit pour 2,000 kilos : plus de dégagement d’acroléine, à peine une légère émanation de gaz acide sulfureux promptement dissipée ; après un lavage à l’eau acide chauffée par la vapeur et un semblable lavage par l’eau pure, la substance grasse, brune, desséchée, se trouve toute préparée pour la distillation. La distillation des acides gras s’opère facilement sous l’influence d’un courant de vapeur que chauffe un serpentin en fer enveloppé de flammes ; cette vapeur d’eau, introduite à 250° environ dans l’alambic, entraîne les acides volatils qui se condensent avec elle dans des réfrigérans entourés d’eau renouvelée ou d’air en mouvement, et l’on voit bientôt s’écouler les liquides aqueux et gras, l’un et l’autre incolores et diaphanes, qui se séparent en vertu de leur densité propre et s’écoulent par deux robinets à des niveaux différens. Ces acides gras, sortis de l’alambic fusibles à la température de 42 à 44°, sont plus durs après le refroidissement que l’huile de palme ou le suif d’où ils proviennent, et débarrassés de l’odeur plus ou moins forte de la matière brute ; mais ils ne sont pas assez solides encore pour former de belles bougies sèches et sonores. Afin de leur donner ces qualités, il est nécessaire d’éliminer la portion fluide du mélange ; on y parvient en laissant cristalliser les acides solides, et en séparant, à l’aide de deux pressions énergiques, l’une à froid, l’autre à chaud, les acides gras liquides ou fluidifiés[1].

Dans la vaste usine Price et Co, dirigée par M. Wilson, aux environs de Londres, j’ai pu reconnaître aussi certaines améliorations très dignes d’intérêt à différens points de vue. Une partie de la distillation

  1. Ici se présentait souvent une difficulté sérieuse, qu’un nouveau perfectionnement, fondé sur d’intelligentes observations de MM. Petit, a permis de vaincre. Cette difficulté tenait à ce que certains suifs provenant des moutons pour la plupart et saponifiés à la chaux, ou les huiles de palme acidifiées, puis distillées, donnaient des cristallisations en masses confuses, qui retenaient fortement la matière oléiforme. On peut changer ces dispositions cristallines en unissant en proportions déterminées les acides gras, et alors, je m’en suis assuré par une vérification expérimentale, on obtient de volumineux cristaux, entre lesquels les acides fluides, librement interposés, s’écoulent facilement sous l’action des presses hydrauliques.