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aient pu être lus. Pendant les jours suivans, on commença à s’entendre un peu mieux. Le 16, la reine Victoria adressait au président des États-Unis un message dont la transmission ne dura pas moins de seize heures, quoiqu’il n’eût que cent mots; il est vrai qu’il fut interrompu par une réparation faite à l’atterrissement de Terre-Neuve et par des demandes de répétition fréquentes. La réponse du président arriva en Angleterre dans la journée du 19. Néanmoins les directeurs de la compagnie n’osaient pas livrer la ligne au public; ils s’envoyaient seulement des félicitations d’un continent à l’autre. Quelques nouvelles de presse et quelques dépêches politiques furent aussi échangées. Deux de ces dernières méritent une mention spéciale en raison de l’importance du résultat. C’était à l’époque de la révolte de l’Inde, et le gouvernement avait jugé nécessaire de faire revenir des troupes du Canada en Angleterre pour les réexpédier aux Indes; notamment il avait donné l’ordre à Montréal et à Halifax de rapatrier les 39e et 62e régimens. Sur ces entrefaites, des nouvelles favorables arrivèrent du théâtre de la guerre, et le gouvernement crut opportun de contremander les ordres de retour donnés à ces troupes, ce qui fut fait par deux dépêches remises à la compagnie transatlantique. L’heureuse et prompte transmission de ces dépêches évita les frais de déplacement des deux régimens, c’est-à-dire une dépense d’environ 1 million de francs.

Le 1er septembre, une interruption subite se manifesta. Le défaut qui existait déjà dans le fil conducteur prit une telle intensité que les transmissions devinrent impraticables; on recevait bien encore quelques mots, mais isolés, sans signification précise. Le 20 octobre, la communication fut complètement interrompue; aucun mot ne passait plus. Les électriciens de la compagnie étaient portés à croire que le défaut se trouvait à une grande distance des côtes, dans les grandes profondeurs de la mer. On ne pouvait songer à réparer le câble, car on l’aurait brisé en le relevant, et en effet, quand on essaya de le repêcher en 1860, on put à peine retirer de la mer une longueur de quelques kilomètres.

Il nous semble intéressant de mettre sous les yeux du lecteur les principales dépêches échangées par ce fil entre les stations de Valentia et de Terre-Neuve; nous les extrayons des documens publiés par le gouvernement anglais.


16 août, Valentia à Terre-Neuve.

Les directeurs de la compagnie en Angleterre aux directeurs en Amérique.

L’Europe et l’Amérique sont réunies par le télégraphe. Gloire à Dieu dans le ciel! paix sur la terre aux hommes de bonne volonté!