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tons ; on y compte aujourd’hui 314,722 chevaux, près de 4 millions de bêtes à cornes et de 20 millions de moutons, qui trouvent dans des pâturages sans limites une nourriture abondante. L’agriculture proprement dite n’a pas fait moins de progrès que l’éducation du bétail, et c’est encore en grande partie à M. Mac-Arthur qu’on les doit, car le premier il introduisit la vigne et donna l’exemple de toutes les améliorations. D’un autre côté, M. Fraser, directeur du jardin botanique de Sydney, s’est appliqué à acclimater en Australie la plupart des végétaux utiles de l’Europe, et aujourd’hui plus de 400,000 hectares sont cultivés en blé, orge, maïs, fourrages, vignes, etc.

Cette étonnante prospérité, malgré les tristes élémens dont la colonie était d’abord composée, est due pour beaucoup à la grande liberté dont jouissent les colons, liberté qui leur permet de donner à leurs facultés toute l’expansion possible. Ce qu’il faut surtout dans les pays neufs, ce sont des hommes énergiques, car ce sont les seuls qui soient en état de lutter contre les obstacles qu’ils rencontrent. Si à ces obstacles naturels viennent s’en ajouter d’artificiels, si des règlemens trop minutieux paralysent leurs forces et amortissent l’effet de leurs efforts, il abandonnent la partie et s’en vont ailleurs chercher un emploi plus fructueux de leur activité. Sous ce rapport, l’Australie a été admirablement servie, car ses premiers colons ont été des convicts, et les mineurs qui plus tard sont venus les rejoindre étaient des hommes pour le moins aussi vigoureusement trempés qu’eux, puisqu’ils abandonnaient leurs foyers pour venir tenter la fortune. Cependant, chose remarquable, au milieu de tous ces individus d’une moralité douteuse, la loi n’a jamais perdu son empire, et quand la force publique faisait défaut, ils se rendaient entre eux une justice aussi prompte qu’impitoyable. Cette énergique population, qui jusqu’ici s’était surtout portée vers les mines, commence à revenir à l’exploitation du sol, qu’elle avait négligée en vue de bénéfices plus immédiats, et tout d’abord elle cherche à tirer parti des produits naturels, tels que les pâturages et les forêts.

Dans les colonies de Queensland et de la Nouvelle-Galles-du-Sud, les forêts ont le caractère équatorial, tandis que dans la Tasmanie et dans Victoria elles ont jusqu’à un certain point l’aspect européen. D’après l’intéressant catalogue dont les exposans de la Nouvelle-Galles ont accompagné leur envoi, le sol forestier peut y être partagé en trois régions distinctes. L’une, ne renfermant que des broussailles et des arbrisseaux, est périodiquement dévastée par les incendies et dépourvue d’arbres de grandes dimensions ; la seconde est couverte de forêts claires, mais formées d’arbres très élevés, peu branchus, garnis de feuilles épaisses, dures, persistantes et très