Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 42.djvu/179

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

jadis à la Vistule même, signifiant par ses deux radicaux, suivant l’étymologie sanscrite ; un fleuve ou un grand cours d’eau[1]. — M. Nilsson pense que c’étaient les Phéniciens qui avaient le monopole des riches fourrures, et qu’ils ne trouvaient ces marchandises que dans la Scandinavie. Strabon, qui décrit leurs petits observatoires pour la pêche dû thon, indique où étaient leurs salines et leurs pêcheries, et la persistance des mêmes procédés de pêche sur les côtes de la Norvège et de la Suède jusque dans notre temps paraît confirmer pour le Nord de pareils indices. — M. Nilsson rappelle enfin les vestiges du culte du feu visibles jusque dans les environs de Tromsoe et dans l’archipel des îles Lofoden, et dresse en terminant toute une liste de dénominations géographiques dans lesquelles se retrouve, suivant lui, le nom du dieu Baal ; il n’est pas jusqu’aux dénominations de Baltique et de Belt dont il ne tire quelque profit.

En résumé, M. Nilsson a voulu démontrer que l’âge de bronze, placé par les antiquaires du Nord entre l’âge de pierre et l’âge de fer, n’a pas été indigène en Scandinavie, mais qu’il y a été apporté par la civilisation phénicienne, fort supérieure à celle des tribus établies depuis longtemps dans le Nord. Les antiquités en bronze que chaque fouille nouvelle met au jour portent des figures qui sont à ses yeux non de simples ornemens, mais des symboles religieux ; les dimensions des armes sont en outre inférieures à celles qui eussent convenu aux tribus indigènes. Ce n’est pas assez pourtant d’avoir suivi les traces de la civilisation phénicienne jusqu’aux extrémités du Nord. Chemin faisant, M. Nilsson a cru pouvoir constater un mélange des deux religions phénicienne et égyptienne qui se retrouverait jusque dans des régions éloignées. Nous avons écarté cette nouvelle discussion pour laisser en toute lumière la thèse principale, l’auteur s’appuyant d’ailleurs dans cette partie de son travail sur des données qui eussent paru contestables, identifiant par exemple avec les Phéniciens non-seulement les rois pasteurs de l’ancienne Égypte, mais même le grand peuple étrusque.

Quant à la thèse dont nous avons exposé l’argumentation ; M. Nilsson l’a-t-il entièrement démontrée, de façon qu’elle soit-désormais admise comme vérité historique ? Nous n’oserions pas l’affirmer ; mais nous nous hâtons d’ajouter qu’on peut bien se demander si une démonstration parfaite en un tel ordre de questions, est possible. Rudbeck, lui aussi, a voulu retrouver le culte du soleil[2]

  1. Hérodote, liv. III, ch. 115.
  2. Au chapitre 5 de son célèbre ouvrage, tome II. Le titre de sa dissertation en dit assez : De Heliolatria, ejusque prima apud Allanticos origine, ac deinceps per Europam, Asiatn et Africam propagatione