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de gui au toit ; les hommes amènent les femmes au-dessous, et là leur souhaitent bon noël et bon nouvel an. On sait enfin notre vieux cri gaulois : Au gui l’an neuf ! si singulièrement perpétué dans un de nos refrains les plus populaires. — Mais l’histoire offre à M. Nilsson un terrain plus solide que ces rapprochemens, quelque ingénieux qu’ils puissent être, lorsqu’il s’efforce de démontrer que le culte de Baal, identique ou non à celui des druides, a dû être apporté dans le Nord par les Phéniciens eux-mêmes, et non par une transmission de peuple à peuple à travers toute l’Europe. Avec le secours des remarquables travaux de MM. Movers et Redslob (Die Phoenizier et Thule), il suit le développement de la puissance maritime des Phéniciens depuis leur berceau ; il les montré élevant aux points les plus périlleux de leur course des phares, speculœ… in quibus speculativi ignes, dit Pline, constructions auxquelles les Grecs et les Romains ont donné le nom de colonnes d’Hercule, c’est-à-dire de l’Hercule phénicien ; il les fait voir, fort avides de pêcheries abondantes, s’établissant à l’embouchure des grands fleuves, et donnant par la naissance à de grandes villes. Marseille avait eu sans aucun doute des fondateurs phéniciens avant l’arrivée des Grecs, car elle avait un temple de Baal, et, dans une île près de l’embouchure du Rhône, des autels à la Diane d’Éphèse, c’est-à-dire à la déesse Astarté, avec deux tours pour guider les navigateurs. Les Phéniciens s’étaient emparés dès le temps de Moïse de la meilleure partie de l’Espagne, et de là il leur avait été bien facile, soit par une circumnavigation, soit en remontant les fleuves orientaux de la péninsule ibérique et en descendant ceux de la Gaule, de se diriger vers nos côtes occidentales. Il faut que le groupe des Sorlingues ait été par eux bien anciennement et bien longtemps exploité, s’il est vrai, comme quelques érudits l’ont récemment soutenu, que de ces îles soit sorti absolument tout l’étain qu’employaient les habitans des côtes de la Méditerranée, même celui qui avait servi à la fabrication d’une cloche dont M. Layard a retrouvé un débris dans les ruines de Ninive.

Ce n’est pas tout : des traces visibles d’établissemens phéniciens à l’est de la Grande-Bretagne se montrent encore. Dans son livre sur les Mœurs des Germains, Tacite dit, en parlant des côtes de la Frise : « Nous avons tenté par là les routes de l’Océan, et la renommée a publié qu’il existait dans ces régions d’autres colonnes d’Hercule, soit qu’en effet Hercule ait visité ces lieux, ou que nous soyons convenus de rapporter à sa gloire tout ce que le monde contient de merveilles. L’audace ne manqua pas à Drusus ; mais l’Océan protégea les secrets d’Hercule et les siens. Depuis, nul n’a tenté ces recherches : on a jugé plus respectueux et plus discret de croire aux