Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 42.djvu/171

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de nombreux textes, et la Suède en particulier quelques monumens extérieurs fort peu connus ; ils s’appliquent à les interpréter, et ces conditions différentes modifient considérablement leur système d’étude. La philologie se présente tout d’abord à eux comme un auxiliaire absolument indispensable. Il s’en faut que la science du Nord ait dit son dernier mot, on peut du moins l’espérer, sur les anciens idiomes des peuples Scandinaves ; elle a fort à faire dans cette voie nouvelle et féconde, à cent lieues de laquelle les fantaisies d’autres fois l’ont jetée, et où la science moderne, plus gravement inspirée, l’invite à revenir. Les runes primitives sont encore aujourd’hui illisibles, nous l’avons dit, et l’on ne peut réussir à les interpréter qu’au prix d’études attentives et patientes sur l’ancienne langue norrène. Ces études sont indispensables aussi pour arriver à fixer l’âge des poèmes eddiques, problème d’une extrême importance pour la philologie comparée et pour l’histoire des religions. M. Save, professeur à l’université d’Upsal, est celui qui s’est livré avec le plus d’ardeur à ces études nouvelles ; ses observations grammaticales, ses commentaires sur la langue des sagas, ses traités spéciaux concernant des points de linguistique, sont autant de services rendus à la science sur un terrain non frayé où il avance prudemment.

En dehors des textes cependant, la Suède possédé sur ses côtes un certain nombre de monumens d’une interprétation fort difficile : des rochers couverts de figures ayant évidemment une signification symbolique ou historique, des tombeaux, des chambres souterraines, une entre autres fort curieuse appelée le monument de Kivik. M. Holmberg a essayé d’expliquer les images des rochers, mais il n’est arrivé, il faut le dire, qu’à des résultats fort hypothétiques, et ne pouvait sans doute espérer mieux. Du dernier monument, M. Nilsson vient de publier tout récemment un essai d’interprétation ; son livre a fait sensation dans le Nord, en Angleterre et en Allemagne ; c’est de cet intéressant volume que nous voudrions, pour achever de tracer un tableau des derniers progrès de l’archéologie Scandinave, faire connaître la méthode et les conclusions. Sous prétexte de publier une nouvelle édition de son livre célèbre : Des habitans primitifs du Nord Scandinave, M. Nilsson, aujourd’hui plus que septuagénaire, donne, à vrai dire, un ouvrage entièrement nouveau, dans lequel il avance que l’âge de bronze n’est pas indigène en Scandinavie, mais qu’il y a été importé par les Phéniciens en même temps que le culte de Baal où du feu, dont le monument de Kivik serait encore aujourd’hui un persistant témoignage.

Kivik est situé sur la côte sud-est de la Suède, en Scanie, près de la petite ville de Cimbrishamnn. Sous une immense pyramide composée de pierres roulantes, évidemment apportées jadis par la