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du XVIIIe siècle, montre déjà, il est vrai, une meilleure critique et rompt, avec certaines opinions trop acceptées ; mais il faut aller jusqu’aux limites de notre temps, jusqu’à Finn Magnusen et Pierre-Érasme Müller, pour rencontrer une école vraiment scientifique. Aujourd’hui enfin cette école est fondée ; elle a conquis de précieux résultats depuis trente ou quarante années, grâce à une méthode excellente, qui sait procéder avec ordre, retarder l’examen de problèmes encore insolubles, et s’attacher aux faits de simple observation. Les savans du Nord ont les qualités qui expliquent de tels succès : ils ont le génie de la classification et celui de l’induction ; leur imagination leur sert à étendre le champ du raisonnement ; la simplicité de mœurs qui règne autour d’eux, avec une richesse moyenne et une vie nécessairement très ramassée autour de la lampe et du foyer, tout cela excite et sert leur travail patient et dévoué. La vie à la campagne, au soleil et en plein air ne dure chez eux que quelques mois, avec grand charme il est vrai ; le reste du temps, ils se groupent en associations laborieuses où chacun apporte le fruit de ses longues veillées. Ces sociétés sont indispensables là où chaque travailleur ne dispose que de ressources restreintes, d’un idiome peu répandu, d’un public peu nombreux ; on comprend que le faisceau y soit plus nécessaire que dans les pays plus riches, qui offrent à chacun en particulier des scènes plus retentissantes. C’est au milieu de ces académies que se produisent aujourd’hui dans le Nord des philologues classiques comme M. Madvig, des orientalistes comme M. Westergaard, des astronomes comme M. Hansteen, des naturalistes comme MM. Fries, Nilsson, Eschricht, Huss, Steenstrup, des érudits comme MM. Werlauff, P.-A. Munch, Carlsson et Sâve, des archéologues enfin comme MM. Müller, Worsaae et Rafn.

À côté des sociétés savantes se placent les musées scientifiques et archéologiques. Il faut avoir visité ceux de Copenhague pour bien savoir de quel secours peuvent être, chez un petit peuple où l’instruction et le patriotisme sont répandus, ces galeries nationales justement respectées. Ce que l’opinion publique réclame dans nos musées, un enseignement spécial qui soit le commentaire vivant des pages souvent mystérieuses qu’on expose aux regards du public, pensée fort ancienne chez nous, et qui a reçu même un commencement d’exécution par l’établissement des chaires annexées à la plus importante de nos bibliothèques ; ce que l’Angleterre commence à réaliser sur une grande échelle dans son musée de Kensington, les galeries du Danemark le mettent depuis longtemps en pratique, grâce au dévouement sans bornes de leurs conservateurs. Ils sont là, toujours à leur poste, prêts à donner au paysan danois comme au savant étranger cent explications diverses, ouvrant les armoires,