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nette sur ce corps, qui, manœuvrant sur un terrain très en pente, pouvait facilement être rejeté à la mer, les Anglais engagèrent un feu de tirailleurs du sommet des hauteurs qu’ils occupaient. On passa outre pour prendre des positions; le débarquement continuait toujours : quatre cents hommes rejoignirent leurs compagnons. Malgré une vive mousqueterie qui leur causa des pertes nombreuses, les Français ne tardèrent pas à s’emparer de la tour de Damacuta, de la tour Materita, de la tour di Guardia, et d’un moulin à vent placé en vedette sur un piton élevé qui domine la ville d’Anacapri. Les Anglais avaient maladroitement éparpillé leurs lignes de défense. Le major Hamill, commandant à Anacapri, le capitaine Church, dirigeant la défense des environs de Damacuta, ignoraient mutuellement leur sort : ils venaient d’être coupés par leur centre. De nouvelles troupes avaient renforcé le corps d’attaque français. Le général Lamarque marcha de sa personne sur Anacapri, qu’il enleva après un combat assez chaud, pendant lequel tomba pour toujours le major Hamill en défendant l’église où il essayait de se retrancher.

Pendant ce temps, les autres assaillans, divisés en deux bandes et filant, l’une par le côté sud, l’autre par le côté nord, allèrent s’emparer, la première de Monte-Solaro, où existait une redoute, qui fut vite enlevée, la seconde de Capo di Monte, qui commande l’escalier, seule route pour se rendre à la Marine et sur le territoire de Capri. Les Anglais étaient donc repoussés de toutes leurs positions. Seul, le capitaine Church, ignorant ce qui se passait autour de lui, s’obstinait à vouloir reprendre la tour de Damacuta. La nuit était venue, quand, comprenant enfin l’inutilité de sa persistance, il se mit en retraite. En approchant d’Anacapri, il put se convaincre, à la clarté de la lune, que la ville était entre les mains des troupes du général Lamarque. Il s’avança aussitôt vers Capo di Monte pour se retirer vers Capri; le qui-vive des sentinelles l’arrêta; avec assez de présence d’esprit, il répondit en français qu’il conduisait un détachement napolitain. La ruse aurait pu réussir sans les uniformes rouges de quelques soldats du Royal-Maltais, qui donnèrent l’éveil. Le capitaine, se sentant enfermé de tous côtés par un cercle ennemi et ne voulant pas se rendre prisonnier, prit une résolution héroïque. Malgré la nuit, il se laissa glisser du haut de l’immense rocher qui sépare Anacapri de Capri; son détachement le suivit à travers cette route impossible; un seul homme tomba qui fut broyé dans sa chute. Pendant toute la journée, Hudson Lowe, prenant au sérieux une fausse tentative de débarquement vers le Palazzo di Mare, demeura à tirailler contre les canonnières et contre les chalands, au lieu de se porter au secours d’Anacapri, dont tous les postes appartenaient le soir au général Lamarque.

Dès le lendemain, les Français se mirent en mesure d’attaquer