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entier des eaux de l’ouest, enfin déloger de Richmond, sa capitale, le gouvernement rebelle.

Par le blocus, on isolait les insurgés, des étrangers, dont la sympathie leur était assurée, on empêchait l’introduction de la poudre et des armes, on arrêtait les exportations et les ressources qu’elles pouvaient procurer, on s’opposait enfin à l’introduction de denrées qui du dehors auraient toujours fini, malgré l’état de guerre, par pénétrer dans le nord, au grand détriment des manufactures nationales et du trésor fédéral. À la marine appartenait la tâche de ce blocus. Elle s’en acquitta d’une manière assez inefficace d’abord, faute de moyens suffisans ; mais peu à peu la surveillance alla en se resserrant, au point de devenir difficile à déjouer.

La possession du Mississipi était une impérieuse nécessité. Le grand fleuve et ses affluens sont le débouché de toutes les contrées qu’ils arrosent. Ce sont les artères des états de l’ouest, états jusqu’ici restés fidèles à l’Union, mais dont les intérêts pourraient bien à la longue refroidir l’enthousiasme et parler même plus haut que les croyances. Refaire l’Union par l’intérêt, sur la base de l’esclavage, est depuis longtemps le programme des meneurs du sud. Leur abandonner les fleuves de l’ouest sans combat, c’était résoudre à moitié la question. On se décida donc à engager la lutte sur ce théâtre. La marine reprit la Nouvelle-Orléans par un coup de main brillant. C’était le principal ; on mettait ainsi la clé dans sa poche. Quant au cours du Mississipi, le soin de le reconquérir fut confié aux armées de l’ouest, admirablement secondées par la flottille de batteries blindées et de béliers à vapeur du commodore Foote. La guerre prit dans ces parages un caractère tout nouveau. Tant qu’on n’eut à agir que par eau, les opérations furent très rapides. L’ennemi ne pouvait intercepter les magnifiques voies navigables, si favorables à l’attaque, qu’offraient les grands fleuves de l’ouest. Par eau, on assiégeait Columbus, sur le Mississipi, tandis qu’en remontant promptement les rivières du Tennessee et du Cumberland, on coupait les communications de l’armée chargée de défendre ce poste important. Une fois isolée de ses chemins de fer, celle-ci dut battre en retraite vers le sud. Elle recula ainsi de position en position, à mesure que la flottille du nord descendait le fleuve, et que son armée se saisissait des principaux embranchemens de chemins de fer. Seulement la marche des fédéraux devint très lente alors que, n’ayant plus pour s’avancer des cours d’eau navigables et parallèles au Mississipi, comme le Tennessee, ils durent reconstruire au fur et à mesure les chemins de fer nécessaires à leur approvisionnement, que l’ennemi détruisait en se retirant.

Restait la dernière opération : chasser de Richmond le gouvernement insurrectionnel. En se concentrant dans les mains de M. Davis,