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qui présideront alors à la direction, des affaires publiques. Qu’on le sache bien et qu’on s’y prépare, la liberté, comme toujours, n’entrera pas à petit bruit dans son nouveau domaine. Elle y fera brusquement irruption en victorieuse, exigeante, avec son cortège ordinaire de troubles et de tempêtes. Il faut donc s’affermir le cœur et se ceindre les reins : il y aura des luttes à soutenir et des combats à livrer ; mais lutter pour faire triompher le bon sens, combattre pour donner la victoire à la vérité, n’est-ce pas la mission des bons gouvernemens et la destinée des peuples intelligens ? Ce qu’il s’agit d’acquérir vaut l’effort et paiera d’ailleurs et au-delà le prix dont il aura été acheté.

Je m’arrête, et j’ai presque honte d’en avoir tant dit sur les affaires d’Italie et sur une question la plus considérable peut-être parmi celles qui se sont imposées de nos jours à la réflexion des hommes, Les opinions modérées auxquelles j’appartiens, et qui ont inspiré ce travail, n’ont pas chez nous obtenu assez de succès pour être présentement fort à la mode. Il convient donc à ceux qui les professent d’être modestes, et je n’ai pour mon compte aucune propension à donner des conseils à qui que ce soit. Il est impossible cependant de ne pas convenir que les idées modérées ont par elles-mêmes quelque valeur, car elles sont le fruit de l’expérience des siècles et de la sagesse des nations. C’est à elles, qu’il faut revenir quand on a vainement essayé, de toutes les autres ; ce sont elles qui apportent, quand l’heure en est sonnée, la solution des problèmes inutilement cherchée ailleurs. Puis, le dirons-nous ? quand la liberté est en jeu quelque part, nous ne saurions demeurer indifférens, et je me figure toujours que cela nous regarde un peu. Oui, je m’en accuse et j’en demande pardon à qui de droit, quelle que soit la question qui s’agite, commerciale, civile, politique ou religieuse, n’importe où elle est agitée, fût-ce en Italie, fût(ce au Mexique, fût-ce en Chine, si un progrès libéral est en voie de s’accomplir, je me sens ému, et je me surprends à espérer qu’un jour la France en profitera.


O. D’HAUSSONVILLE.