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dans une mesure restreinte, des essais présentés à l’exposition. Ainsi les Anglais y ont un wagon de première classe, construit à Manchester, dont les compartimens, au nombre de quatre, communiquent les uns avec les autres. Un salon au milieu avec des tables et des canapés, aux deux bouts des caisses ou divans de dimension différente très commodément disposés, telle est la structure adoptée. Le voyageur dès lors n’est plus cloué sur son siège comme aujourd’hui, il peut se lever, changer de place, passer dans le salon commun, ou s’isoler dans le coin de son divan. Une innovation analogue a pris en Belgique une forme un peu différente. Les compartimens placés aux deux extrémités ne donnent plus sur un salon, mais sur une large plate-forme couverte et formant balcon des deux côtés. Quoique avec moins d’originalité, un wagon prussien, d’une exécution irréprochable, semble vouloir également dégager un peu le voyageur des liens qui le condamnent aujourd’hui à l’immobilité. Entre toutes les caisses sont ménagées des portes intérieures. Un wagon de troisième classe, appartenant de même à la Prusse, se fait remarquer par une installation très soignée, n’ayant plus rien de commun avec cette idée trop longtemps entretenue dans la plupart des exploitations européennes, que, pour contraindre les voyageurs à payer les prix les plus élevés, on devait rendre le moins commodes possible les voitures des classes inférieures.

En France, la force du courant démocratique semblait devoir nous préserver de ce faux calcul. Loin de là cependant. On ne paraissait même pas, dans le sein de nos exploitations, se douter du principe que les appels au grand nombre sont la source la plus sûre des grosses recettes. Sur ce point, une lutte véritable a existé chez nous entre les compagnies et le public. Tandis que d’une part l’immense majorité des voyageurs s’obstinait à prendre les voitures les moins chères, les compagnies s’évertuaient par tous les moyens imaginables à l’en écarter. Inutiles efforts ! la victoire est enfin restée à la masse, qui avait, Il faut le dire, la raison de son côté. Il a fallu, bon gré, mal gré, améliorer un peu la construction des voitures de dernière classe. Que ces améliorations aient tourné à l’avantage des compagnies elles-mêmes, on ne saurait plus le mettre en doute. Permettez d’économiser les frais de déplacement, et vous êtes sûrs de multiplier les voyages. Dans la catégorie qui nous occupe, ce n’est plus notre pays, il faut l’avouer, qui figure à la tête des innovations, comme tout à l’heure dans l’ordre des applications mécaniques : non pas que le service des voyageurs, tel que l’a jusqu’à ce jour compris l’Europe, soit inférieur en France à celui d’un pays quelconque, rien ne serait plus inexact qu’une pareille assertion ; seulement cette organisation reste murée dans les conditions du système primitif. On n’y aperçoit pas ces efforts vers un certain é