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qui a permis déjà de franchir les aspérités du Sommering[1].

Un fait qui ne dépend plus de la science même de l’ingénieur, qui se rattache à une pensée d’humanité, mérite d’être noté dans la galerie des locomotives : il s’agit de dispositions ayant pour objet de protéger les agens qui dirigent le moteur. Que voyait-on naguère ? que voit-on encore dans beaucoup de cas ? Les mécaniciens, placés à l’arrière des locomotives, y demeurent sans aucun abri ni contre le vent ni contre la pluie. On s’est mis enfin depuis quelque temps à placer perpendiculairement d’énormes lunettes qui les garantissent un peu, sans pourtant les empêcher de voir au-devant d’eux. Cette idée a gagné du terrain, l’exposition l’atteste. À mesure que le réseau s’étend, à mesure qu’il franchit les limites de la zone la plus tempérée de notre hémisphère, on doit se préoccuper des difficultés croissantes que rencontre le mécanicien. Voyez les locomotives achetées pour le service des chemins égyptiens, placées durant huit ou neuf mois de l’année sous les rayons d’un soleil brûlant : l’arrière est pourvu d’une tente en tôle avec panneaux vitrés à l’avant et deux grandes baies complètement ouvertes sur les côtés. Dans nos régions même, la lunette actuelle doit paraître insuffisante. Le moins qu’on puisse faire, c’est d’en recourber l’encadrement à la partie supérieure, de manière à former une sorte d’auvent, comme on en aperçoit des exemples à Londres[2].

Ainsi, pour les locomotives, c’est la perfection toujours croissante dans la construction des appareils qui frappe d’abord l’observateur ; c’est ensuite la recherche incessante, très répandue, sinon tout à fait générale, des combinaisons susceptibles d’accroître la puissance des mécanismes, d’augmenter la vitesse, ou de procurer directement ou indirectement une économie dans l’emploi du combustible. Placée dès longtemps à la tête des études scientifiques provoquées par l’établissement des chemins de fer, la France tient encore en main la direction suprême du mouvement. Notons en outre un effort réel de la part des divers peuples du continent, à mesure que se développe leur réseau, pour installer chez eux des ateliers de construction ou développer ceux qu’ils possèdent. Tels étaient les points essentiels à signaler.

Peut-être la curiosité du lecteur ira-t-elle plus loin : peut-être, à

  1. Rappelons ici que les voies ferrées, qui avaient été à l’origine presque entièrement réservées à l’état en Autriche, ont été cédées à l’industrie privée de 1855 à 1857, si bien qu’il n’y a plus que le chemin de ceinture de Vienne qui soit encore la propriété de l’état.
  2. Diverses dispositions de détail, introduites ça et là dans les locomotives pour faciliter certaines opérations pendant la marche, se rattachent à une idée analogue. La locomotive d’Orléans, par exemple, présente de ces dispositions pour le graissage en route de la machine et pour l’approvisionnement d’eau.