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et c’est une grande nouveauté pour ce pays si longtemps courbé sous le joug de Ferdinand II, qui disait de bonne foi : « L’imprimerie est l’invention du diable ! » De son temps un seul journal existait : il Giornale officiale del regno Delle Due Sicilie. Pendant la guerre de Crimée, sous prétexte que la cour de Naples était neutre, il ne dit pas un mot des opérations des alliés devant Sébastopol : on peut juger, par ce seul fait, de quelle façon les questions politiques y étaient traitées. Dans les dernières années de son règne, Ferdinand autorisa la création de l’Iride ; mais ce journal ayant dit qu’il fallait que l’Autriche se sentît bien affaiblie pour avoir accepté les stipulations du traité de Zurich, il fut immédiatement supprimé. Sans être nombreuse, la presse de Naples est assez importante, elle se fortifie tous les jours et tend à devenir un auxiliaire sérieux de la liberté parlementaire. En juin 1860, lorsque François II octroya la constitution qui aida si puissamment à l’accomplissement de l’œuvre de Garibaldi, car elle donnait une liberté relative sans réussir à faire naître une confiance que détruisaient naturellement les souvenirs du passé, une masse de journaux apparut de tous côtés ; ce peuple si longtemps réduit au silence avait besoin de parler tout de suite et quand même. Ce qui subsisté de cet effort un peu désordonné constitue à cette heure la presse napolitaine. Le Journal officiel est devenu le Journal de Naples, il correspond à notre Moniteur et transcrit les actes du gouvernement. Un seul journal représente ce que nous appelons chez nous la presse officieuse ou semi-officielle, c’est la Patria, qui, après avoir eu quelques velléités d’indépendance, est devenue tout à fait conservatrice et ministérielle ; c’est là que l’on va chercher les inspirations du gouvernement dans certains articles qui préparent l’opinion publique à accepter les actes déjà résolus en principe. Le journal le plus important de Naples, le mieux rédigé, est sans contredit le Pungolo (l’Aiguillon), sorte de Times napolitain dont le tirage s’élève à plus de 10,000 exemplaires, chiffre relativement très considérable ; il est franchement attaché au régime actuel, mais garde, une indépendance de bon aloi qui, sans jamais dégénérer en opposition, lui permet de donner souvent au gouvernement des avertissemens salutaires ; c’est le journal qui représente le mieux, et dans ses différentes nuances, l’opinion des Napolitains éclairés. Puis viennent le Nomade, l’Omnibus, le Paese, dévoués au système parlementaire approuvant la marche générale du cabinet de Turin, et ne faisant guère d’opposition que dans les questions locales où les provinces napolitaines sont directement intéressées. Ce que l’on nomme en Italie le parti de l’action est représenté dans la presse napolitaine par le Popolo d’Italia, organe qui montre quelque ardeur, et qui, dit-on, reçoit directement ses inspirations de Mazzini. J’avoue que je n’en crois rien : il semble être de mode maintenant