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plication de ce principe qui est la base des traités de réciprocité que nous avons avec plusieurs puissances. Nous pouvons donc juger aussi les résultats du système de libre concurrence. À cet effet, nous allons citer deux exemples bien saillans[1].

Avant le traité de 1822 qui nous lie avec les États-Unis, notre marine partageait avec la marine américaine les transports entre les deux pays. Depuis, le pavillon de l’Union s’est emparé de tout l’intercourse. En 1860, le mouvement maritime avec les États-Unis (entrées et sorties) s’élevait à 495,440 tonneaux, sur lequel nos bâtimens prenaient 16,221 et les navires américains 454,228 tonneaux, soit pour nous, en négligeant les fractions, 3 pour 100, et pour nos concurrens 91 pour 100. Le complément est la part du pavillon tiers.

Avant le traité de 1826 avec l’Angleterre, nous avions une supériorité marquée dans nos rapports avec elle, puisque nous intervenions dans l’intercourse pour 56 pour 100. Le régime d’assimilation a interverti la position des deux marines. Le mouvement de navigation entre la France et l’Angleterre, Malte, Gibraltar, les Îles-Ioniennes compris, est de 2,589,933 tonneaux (entrées et sorties). Nous négligeons la part du pavillon tiers. Sur cet ensemble, la marine française prélève 482,644 tonneaux, et la marine anglaise 1,907,289 tonneaux, c’est-à-dire que notre proportion est de 26 à 27 pour 100, et celle de l’Angleterre de 73 à 74 pour 100. Peut-être trouvons-nous dans le mouvement général et dans notre supériorité vis-à-vis d’autres puissances une compensation à notre infériorité vis à r-vis de l’Angleterre et des États-Unis ? Voici la réponse à cette question. Le commerce maritime à la voile et à la vapeur avec l’étranger et les colonies (entrées et sorties) était en 1860 de 6,856,642 tonneaux : dans ce résultat, notre pavillon intervenait pour 3,005,146 tonneaux, soit 43 pour 100, et le pavillon étranger pour 3,850,896, ou 56 pour 100. La proportion nous serait encore, bien autrement défavorable, si nous déduisions de cet ensemble de tonnage notre commerce avec les colonies, qui en 1860 nous était réservé, et notamment celui de la pêche, acquis exclusivement à notre pavillon[2]. La nouvelle législation coloniale est appliquée depuis trop peu de temps pour qu’on puisse en juger les effets ; mais il est tout naturel de prévoir qu’elle amènera une diminution plutôt qu’une augmentation dans le mouvement de nos navires.

Nous aurions d’autres réductions à faire au bilan de notre navi-

  1. Nous avons environ vingt-six traités de réciprocité avec les puissances étrangères.
  2. Tableaux du Commerce extérieur publiés par la direction générale des douanes, 1860. — La pêche figure dans ce tonnage pour 136,895 tonneaux, entrées et sorties.