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est difficile de deviner ce que veulent dire ces signes. La tête de Vulcain est quelquefois remplacée par une tête de Minerve étrusque coiffée de son casque, comme la Minerve athénienne. Sur l’exergue est la chouette, l’oiseau fidèle de la déesse. Enfin on a aussi représenté sur ces pièces une figure de gorgone tirant la langue.

Le majordome et le vieux curé avaient mêlé leurs monnaies étrusques, à la fois si curieuses et si intéressantes, avec des médailles romaines. Ils ne faisaient aucune différence entre celles-ci et les premières, confondant la tête des césars et celle de Vulcain. Le pupluna des sous étrusques et le S. C. (Senatûs-Consultû) des as romains avaient à peine frappé leurs yeux. Ceci prouve qu’on peut citer à propos Virgile et professer pour les Étrusques une grande admiration, sans rien entendre à la chronologie.

Le lendemain d’une journée si bien remplie, j’allai visiter au dehors de Populonia, dans une vigne du chevalier Desiderii, une magnifique mosaïque. Elle date certainement de l’époque étrusque et représente une grande pêche. La barque apparaît au milieu de la mer ballottée par les vagues, pendant que les pêcheurs tirent leurs filets. Sous l’eau, suivant l’usage admis par les mosaïstes représentant ces sortes de scènes, nagent différens poissons. Quelques-uns sont parfaitement réussis. Cette mosaïque devait faire partie d’une chambre de bain, comme des restes de canaux découverts dans le voisinage semblent l’indiquer. Malheureusement le propriétaire n’a nul souci de ses richesses souterraines ; il ne veut faire entreprendre aucune fouille, et la mosaïque reste à moitié cachée sous la terre. On ne la découvre qu’aux rares voyageurs que le hasard ou l’étude amène à Populonia. Un seau d’eau jeté à la hâte sur le dessin, d’après la méthode italienne, lui rend momentanément un peu de sa netteté ; puis on recouvre le tout de terre jusqu’à une prochaine visite. Cette admirable relique reste ainsi exposée à toutes les intempéries. Elle a été par hasard découverte quand on a creusé le sol pour y planter la vigne, et la bêche du vigneron l’a en partie dégradée. À côté est un pan de mur auquel sont adossées des arcades qui paraissent dater de l’époque romaine. Elles sont tapissées de lierre, et composent une ruine de l’effet le plus pittoresque.


II. — LES MINES ET LES FONDERIES ETRUSQUES DE CAMPIGLIA.

De Populonia, je me dirigeai vers Campiglia, où m’attendait un ami établi dans la contrée. Gamba Corta, que les fièvres de la Maremme remplissaient d’épouvante, commençait à regretter l’aspect plus riant de la plage livournaise. Il m’avait demandé instamment