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Coquille qualifiait le Bourbonnais un pays composé en marqueterie et comme en mosaïque de plusieurs pièces rapportées.

Cette organisation bizarre, qui avait succédé d’assez près à la confiscation des états du connétable de Bourbon sous François Ier, avait eu probablement pour but de dissoudre l’agglomération formée au centre de la France des domaines de cette puissante maison. L’ancienne unité avait péri, mais il ne s’en était pas formé une nouvelle ; les parties qui la composaient n’avaient rien de commun ; le système d’impôts n’était pas le même, le Nivernais et le Bourbonnais étant soumis à la grande gabelle, tandis que la Marche était rédimée de l’impôt du sel ; des coutumes différentes les régissaient, et même sous le rapport religieux elles se partageaient entre quatre diocèses, ceux d’Autun, de Bourges, de Clermont et de Nevers ; Moulins n’avait pas d’évêché. L’ensemble avait fort peu prospéré sous l’administration monarchique ; la généralité de Moulins était plus pauvre encore que celle de Limoges.

On sait que Necker, qui cherchait à émanciper d’abord les provinces les plus malheureuses, avait créé une assemblée provinciale à Moulins pendant son premier ministère, en 1780. La résistance de l’intendant et du parlement fit échouer ce projet, qui avait reçu cependant un commencement d’exécution. L’assemblée instituée par Necker s’était réunie sous la présidence de l’évêque d’Autun, M. de Marbeuf : elle avait nommé sa commission intermédiaire et ses procureurs-syndics. La commission intermédiaire s’occupa, entre autres choses, de plusieurs desséchemens de marais, et fit faire une carte de la généralité, divisée en vingt-six arrondissemens ou districts ; elle se sépara sur la signification qui lui fut faite de l’arrêt du conseil du 29 juillet 1781 qui suspendait ses pouvoirs. Le succès qu’obtinrent dans les années suivantes les deux assemblées provinciales du Berri et de la Haute-Guienne ne put qu’exciter des regrets particuliers dans cette généralité voisine, qui avait un moment joui des mêmes droits. L’édit du mois de juin 1787 y fut accueilli avec joie ; mais, par une fatalité nouvelle, il n’y fut pas exécuté sur-le-champ. Ce qui amena ce retard fut la demande que fit le Nivernais d’une assemblée spéciale. Appuyée par l’évêque de Nevers, M. de Seguiran, et par le duc de Nivernais, qui était alors ministre, cette prétention finit par réussir ; mais les négociations ne durèrent pas moins d’un an. Ce ne fut qu’au mois d’août 1788 que parurent les règlemens qui instituaient dans la généralité deux assemblées provinciales, l’une pour le Nivernais, l’autre pour le Bourbonnais et la Marche.

Celle du Nivernais se réunit la première, le 16 août 1788, dans la bibliothèque des révérends pères récollets, à Nevers, sous la présidence de l’évêque. Elle devait se composer de 24 membres.