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de leur nombre dépend même le maximum de la puissance du sol. Pour peu qu’on veuille bien y réfléchir, leur rôle, réellement utile sous ce rapport, est facile à comprendre : sans aucun doute ; ce qu’ils consomment et emportent de substances azotées et salines puisées dans les fourrages est perdu pour la fumure du terrain ; mais d’un autre côté il faut bien tenir compte des substances inutiles comme engrais qu’ils consomment en plus grande proportion : tels sont les principes immédiats non azotés, cellulose, amidon, inuline, gommes, sucres, etc.. La plus grande partie de ces substances étant ainsi éliminée, ce sont en définitive les matières azotées et salines qui dominent dans les déjections liquides ou solides destinées à servir d’engrais, et ceux-ci se trouvent alors dans un état d’autant plus favorable que les principes azotés ou salins, désagrégés ou dissous, sont éminemment fermentescibles ou solubles. Si donc les herbivores n’augmentent pas bien réellement la masse des engrais, du moins, en détruisant pour ainsi dire en plus grande proportion les principes les moins utiles ou même nuisibles par leur excès, ils font dominer les principes nécessaires à la nourriture des plantes. Les hommes eux-mêmes rempliraient, pour toute la portion de leur alimentation végétale, ce rôle éminemment favorable au développement de la production agricole, si partout, comme dans nos contrées du nord et en Belgique, comme en Chine même, on utilisait complètement les déjections au profit de l’agriculture.

C’est parfois encore une méthode fort utile que d’employer les engrais verts, bien qu’elle soit en opposition jusqu’à un certain point avec celle que nous venons d’exposer. Sous le nom d’engrais verts, on désigne les tiges et les feuilles ou fanes des végétaux herbacés spécialement cultivés pour servir d’engrais, tels que lupin, colza, madia sativa, seigle et diverses autres plantes choisies en raison de leur rapide développement. Ces plantes renferment, à l’époque de leur floraison, le maximum de leurs sécrétions salines et azotées ; c’est donc le moment de les enfouir dans le sol à l’aide d’un labour à la charrue. Théoriquement, rien n’est perdu dans ce cas : les alimens minéraux et organiques que la plante a puisés dans le sol et dans les gaz atmosphériques se retrouvent parmi les produits de la décomposition spontanée du végétal enterré par le labourage. Une pareille fumure convient parfaitement aux sols secs et peu fertiles, dont la superficie se trouve doublement amendée par l’humidité qu’y entretient la plante enfouie, gorgée de sucs aqueux et riches en substances alibiles, que la fermentation spontanée désagrège ou volatilise et met ainsi à portée de la végétation nouvelle que l’on a préparée à l’aide d’un ensemencement spécial.

Ailleurs encore, par exemple dans certaines localités de l’Italie