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Je vais m’expliquer mieux : de quelque nom qu’on appelle les crédits destinés à faire face aux dépenses extra-budgétaires, il y aura toujours des services publics pour lesquels les prévisions du budget, si larges qu’elles soient, seront accidentellement en défaut, et il y aura toujours aussi d’autres services qui se trouveront trop richement dotés. De là nécessité d’allocations supplémentaires ; de là, d’un autre côté, obligation de faire face à ces allocations au moyen de viremens de crédits en consacrant l’excédant d’un chapitre à pourvoir à l’insuffisance d’un autre. De même il y aura toujours, soit à l’intérieur, soit à l’extérieur, des circonstances imprévues, impossibles même à prévoir, qui nécessiteront l’emploi immédiat de ressources auxquelles n’aura pu pourvoir le budget en cours : de là les crédits extraordinaires dont la dette flottante fournit les fonds, et que le corps législatif ne peut sanctionner par son vote que lorsque la dépense est faite et payée. On comprend que ce soit là, dans l’administration de la fortune de l’état, le point sur lequel se fasse le plus vivement sentir la nécessité d’un contrôle efficace.

Jamais les esprits sérieux qui se sont occupés de finances n’ont condamné d’une manière absolue les crédits supplémentaires et extraordinaires. Ils ne se sont élevés que contre l’abus, recommandant la modération et subissant la nécessité. Toutefois, en l’absence de frein suffisant, l’abus avait pris de telles proportions qu’on a voulu y remédier. Tel est le but du sénatus-consulte du 31 décembre 1861. On ne pouvait changer la force des choses ; on a pensé qu’il suffirait de supprimer les crédits supplémentaires et extraordinaires et de les remplacer par des viremens de crédit, car le mémoire affirme que « les circonstances les plus graves et les plus inattendues peuvent trouver des ressources dans notre vaste budget et donner le moyen d’attendre la réunion du corps législatif. » M. Fould dit encore ailleurs : « Telle était la pensée qui avait dicté les dispositions du sénatus-consulte du 25 décembre 1852, dispositions malheureusement modifiées par la loi du 5 mai 1855 et par le décret du 10 novembre 1856, qui ont exclusivement réservé les viremens de crédits pour couvrir, après la première année de l’exercice, l’insuffisance des allocations. » Condamnant ces restrictions et voulant rendre possible l’application du nouveau système, M. Fould ajoute deux conditions que je reconnais indispensables à ce système : — d’abord que le budget soit bien fait, que tous les services y soient suffisamment dotés, que le corps législatif accorde, pour prix de la concession faite, un budget où les allocations soient en rapport avec les besoins réels ; — en second lieu, que le gouvernement, en faisant régulariser les viremens de crédits devant le corps législatif,