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des branches entrelacées de la paroi, tandis que leur face concave est arrondie en arc de cercle : en calculant le rayon de cet arc, on trouve que la largeur des habitations variait de 3 à 5 mètres, dimensions bien suffisantes pour une famille qui ne cherche dans sa demeure qu’un simple abri. À travers un passé de trente ou quarante siècles, nous pouvons comprendre quel effet pittoresque devait produire cette agglomération de petites huttes pressées les unes contre les autres au milieu des eaux. Le rivage était désert ; seulement de rares animaux domestiques paissaient dans les clairières herbeuses ; les grands arbres déployaient leurs masses de verdure sur toutes les pentes ; un vaste silence régnait sur la forêt. Sur les flots au contraire, tout était bruit et mouvement : la fumée tourbillonnait au-dessus des cabanes, la population s’agitait sur les plates-formes, les canots allaient et venaient d’un groupe de maisons à l’autre et du village à la rive ; au loin voguaient les bateaux de pêche ou de guerre. L’eau semblait alors le véritable domaine de l’homme.

Dès leurs premières découvertes, les archéologues suisses ont reconnu que les habitations lacustres ne dataient pas d’une seule et même époque. L’étude des objets retrouvés au fond des lacs les a conduits à diviser en trois âges le premier cycle de notre histoire : l’âge de la pierre, celui du bronze et celui du fer. Déjà les savans de la Scandinavie avaient constaté pour leur patrie ces trois périodes successives ; mais ces âges ne furent pas contemporains dans les deux contrées La civilisation se propageait alors avec la plus grande lenteur, et des siècles s’écoulaient avant que chaque progrès de l’industrie humaine ne pénétrât du midi de l’Europe dans les froides régions du nord. Les habitudes des peuples ne changeaient qu’à la suite de guerres prolongées ou de migrations lointaines.

C’est principalement dans la Suisse allemande que se trouvent les vestiges des bourgades appartenant à l’âge de la pierre. La Suisse occidentale possédait aussi d’importantes cités lacustres, entre autres celle de Concise, près de l’extrémité méridionale du lac de Neuchâtel ; mais les lacs de Zurich et de Constance paraissent avoir été les centres de population les plus animés. C’est alors que s’élevèrent les pilotis d’Obermeilen, dont la découverte a été le point de départ de toutes celles qu’on a faites depuis. Grâce aux débris recueillis sur cet emplacement et sur les rivages des lacs de Constance, de Pfaeffikon, de Sempach, de Wauwyl, de Moosseedorf, on peut aujourd’hui décrire à larges traits le genre de vie des populations lacustres et donner sur leur histoire quelques indications générales, mais certaines.

Une des choses qui étonnent le plus à la vue de ces restes de