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On voit que les conclusions de l’évêque de Belley pourraient être plus variées.

Palombe ou la Femme honorable est la jeune et belle épouse du comte Fulgent, seigneur espagnol appartenant à une grande famille de Tarragone. Quelques jours après son mariage, le comte est saisi d’une passion insurmontable pour une jeune personne, qu’un accident arrivé dans un combat de taureaux a fait transporter blessée dans sa maison. Il lutte en vain contre cette passion, et il finit par la déclarer à la vertueuse Glaphire, qui en est l’objet, Celle-ci, défendue d’ailleurs par sa mère et par son frère, repousse avec indignation les désirs criminels du comte. Palombe, qui n’a pas tardé à deviner ce qui se passe dans le cœur de son mari, cherche à le ramener en redoublant de tendresse pour lui. Exaspéré par la résistance de Glaphire, le comte ne garde plus de mesure : il déclare que celle-ci ne sortira plus de sa maison. Elle s’échappe sous un déguisement et se réfugie chez l’archevêque, qui la fait conduire dans un couvent. Le comte furieux s’en prend à sa femme, qu’il chasse de chez lui en la reléguant dans une de ses terres. Palombe lui écrit des lettres touchantes, il refuse de les lire. Un jour qu’il les avait réunies pour les lui renvoyer, il en lit une puis une seconde, puis une troisième, et enfin il les lit toutes. L’affliction douce et tendre dont elles sont empreintes agit puissamment sur son âme : il rappelle sa femme, marie Glaphire à son frère, marie sa sœur au frère de Glaphire ; tout finit pour le mieux, et le bon prélat conclut en disant que « les femmes vertueuses et honorables par la douceur et la patience, ramènent à la fin au train de la raison les maris les plus dissolus et les plus débauchés. »

Tel est le canevas ordinaire des romans de l’évêque de Belley. Quelquefois cependant il tire ses sujets de circonstances particulières au temps où il vivait. C’est ainsi que dans un ouvrage composé de cinq nouvelles, et auquel il a donné ce titre bizarre : Le Pentagone historique, montrant en cinq façades autant d’accident signalés on voit figurer une histoire, Herminia ou les Déguisemens, destinée à combattre et à flétrir la conduite de ceux, ou de celles qui, dit-il, « pour mener plus commodément une vie licencieuse ou pour parvenir, à une vengeance plus assurée, vivent sous un habit qui n’est point convenable à leur sexe. » Ceci s’adresse aux jeunes gens qui se déguisent en filles et aux filles qui se déguisent en garçons. On n’imaginerait pas de nos jours de faire un roman tout exprès pour combattre ce genre d’épidémie.

De tous les romans de Camus, Palombe est incontestablement celui dont la lecture est le plus supportable. Il y a des tableaux présentés avec énergie et vérité. Le combat de taureaux par exemple, où le comte Fulgent joue le rôle de matador, est rendu avec