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tous les détails techniques de leur métier. C’est depuis cette époque seulement que les vrais principes de la sylviculture furent appliqués aux forêts de la France, et c’est à M. Lorentz, fondateur de cette école, et à son successeur, M. Parade, qu’il faut surtout en faire remonter l’honneur. Enfin en 1827 fut promulgué le code forestier qui nous régit encore, et en vertu duquel l’administration forestière fut constituée à peu près comme elle l’est aujourd’hui.

Ce rapide exposé montre tout d’abord combien les changemens politiques sont incompatibles avec une bonne gestion forestière. Il faut pour celle-ci des institutions stables, car les systèmes de culture se font sentir pendant toute la vie des arbres, et, si ces systèmes varient sans cesse, il n’y a plus d’exploitation régulière possible. L’administration forestière a donc, plus qu’aucune autre, besoin d’esprit de suite, et les principes qui la font agir doivent s’y perpétuer indépendamment des hommes qui la composent, Pour apprécier si le but qu’elle se propose est en harmonie avec les saines doctrines économiques, et si elle dispose pour l’atteindre des moyens nécessaires, il faut l’étudier au doublé point de vue de ses attributions générales et de son organisation intérieure.


II

Quelques économistes exclusifs ont admis en quelque sorte comme un axiome indiscutable que le rôle de l’état doit se borner à garantir la propriété des choses et la sécurité des personnes, et qu’il sort de ses attributions dès qu’il dépasse ces étroites limites imposées à son action. Certes l’état ne doit pas se préoccuper des intérêts particuliers ; mais dès que l’intérêt général est en jeu, il faut qu’il intervienne. Toute la question est donc de discerner les cas où l’intérêt social est réellement engagé. En ce qui concerne les forêts, nous avons eu trop souvent déjà l’occasion de développer les motifs qui justifient la possession par l’état d’une partie d’entre elles pour qu’il soit nécessaire d’y revenir. On a vu que ces propriétés ne peuvent être portées à leur plus haut point de production qu’autant qu’elles appartiennent à un être impérissable comme l’état, capable d’en diriger l’exploitation pendant une longue suite d’années, et qu’elles ne conviennent que très imparfaitement à l’appropriation individuelle, parce que les partages qui peuvent les morceler à chaque nouvelle génération sont pour elles une cause de ruine contre laquelle toute réglementation est impuissante.

Les communes et les établissemens publics sont également plus aptes que les particuliers à tirer parti de leurs forêts ; ils le sont