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est appelée à décider des récompenses comme elle a statué sur les admissions ? Mais on ne lui laisse ici, on ne lui laissait du moins à une époque assez rapprochée de nous, qu’une voix consultative. Si nous sommes bien informé, ses arrêts n’ont pas toujours eu force de loi. En fait, la quatrième classe de l’Institut ne participe au gouvernement de notre école que par intervalles et dans une mesure sans proportion, soit avec l’autorité naturelle de la compagnie, soit avec les prérogatives que l’opinion lui attribue. Ce défaut de solidarité entre l’Académie et les œuvres de chaque jour, les membres peuvent un à un s’efforcer d’y remédier ; ce vide qui la sépare de nos générations d’artistes, on peut chercher à le combler par les conseils officieux, par le crédit et les moyens d’action personnels ; mais les occasions sont au moins rares de procéder avec ensemble et de continuer à cet égard les anciennes traditions.

En ce qui concerne l’enseignement, — grave question qui exigerait un examen à part, — nous constaterons seulement l’insuffisance numérique des professeurs attachés aujourd’hui à l’École des Beaux-Arts et les avantages sous ce rapport qu’offrait l’organisation primitive. Qu’on ait cru devoir séparer l’École et l’Institut, sauf à ne rien changer d’ailleurs au fond des choses, qu’un artiste siège ici comme académicien, là comme professeur, au lieu de remplir, à l’exemple de ses devanciers, ces fonctions sous le même toit, peu importe, puisqu’il n’y a en réalité d’innovation que dans la forme. Ce qui est plus regrettable, c’est que les maîtres en titre n’aient plus à côté d’eux des maîtres agrégés, des seconds, pour les aider et les remplacer au besoin. Le petit nombre des professeurs en exercice peut diminuer d’année en année et se réduire presque à l’unité, à mesure que chacun d’eux a atteint la limite d’âge réglementaire, ou que la tâche lui est devenue trop lourde. N’y aurait-il pas lieu, dans l’intérêt de tout le monde, de reconstituer quelque chose d’analogue à cette classe d’adjoints à professeurs qui complétaient autrefois le corps enseignant ?

Suit-il de ce qui vient d’être dit que nous entendions porter atteinte à la légitime aristocratie des talens, que nous proposions contre ce qui existe des mesures renouvelées de celles que réclamait contre l’ancienne Académie la Société révolutionnaire des Beaux-Arts ? Nos vœux sont tout différens, puisque nous voudrions que l’Académie pût agrandir le cercle de son influence, et, sans descendre du haut rang qu’elle occupe, attirer plus habituellement à elle la vie et le mouvement de l’art contemporain. Voilà pourquoi nous demandons avec M. Vitet s’il n’est pas « encore temps, sans rien détruire et sans trop innover, de profiter des exemples du passé. » Qu’il nous soit permis d’ailleurs d’ajouter avec le savant écrivain :