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achèveraient d’en attester l’exactitude et d’en justifier les élémens. Seulement, au lieu de nous infliger toute la science de détail dont il lui a fallu se pourvoir, l’auteur entend ne nous donner que le résumé de ses recherches ; au lieu de nous faire porter la peine de ses propres fatigues, il dispose à notre usage et utilise suivant leur valeur les renseignemens qu’il a recueillis. Il sait bien qu’en pareil cas l’impartialité systématique engendre facilement la confusion ou l’erreur, que, les informations une fois prises, il reste à en déduire les conséquences, et que la besogne du greffier ne saurait supprimer celle du juge. Comme il le dit lui-même dans un passage de son nouveau travail, « ce n’est pas tout de compulser de vieux cartons poudreux, il faut peser ce qu’on y trouve, mettre les choses à leur vraie place, les éclairer de leur vrai jour et ne pas prendre à tout propos des taupinières pour des montagnes. » En nous rendant les annales de l’Académie royale de peinture, M. Vitet a, une fois de plus, pratiqué ces principes et nous a préservés de ces méprises. Son livre est mieux qu’une chronique, mieux qu’un recueil de matériaux à l’adresse de quelques archéologues ou de quelques curieux ; c’est, pour tout le monde, une leçon d’histoire et de goût, un examen succinct et facile dans les termes, mais studieusement approfondi, des questions que soulèvent les souvenirs et les exemples de l’ancienne académie : exemples qu’aujourd’hui encore on ferait bien de méditer, même en vue de certains emprunts ; souvenirs intéressans à coup sûr, puisqu’ils résument tous les progrès, toutes les évolutions, toute l’histoire de l’art français pendant un siècle et demi, et que, depuis Lesueur jusqu’à David, depuis Sarrazin jusqu’à Houdon, depuis Gérard Audran jusqu’à Moreau, ils se rattachent aux noms des peintres, des sculpteurs et des graveurs qui ont, à quelque degré que ce soit, honoré notre école.

Un peu avant l’époque où M. Vitet nous donnait cette belle étude sur l’histoire de l’art français, l’historien de l’Art chrétien en Italie, M. Rio, publiait sous sa forme définitive et dans ses proportions complètes l’important ouvrage dont les diverses parties avaient successivement paru dans le-cours des dernières années. Certes, dans les travaux des deux écrivains, les sujets, les intentions, les procédés d’analyse et de critique, tout diffère trop radicalement pour qu’on songe à établir entre les œuvres mêmes un parallèle impossible. Ces différences toutefois n’impliquent-elles pas un enseignement, et ne peut-on, en vertu du contraste, apprécier d’autant mieux les caractères, les coutumes, les conditions de développement propres à l’art de chaque pays ? Ce qui ressort, au point de vue historique, de l’étude de l’art italien, c’est la continuité de l’action individuelle sur les progrès qui s’accomplissent à diverses époques et en divers