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rouges. Le requin, épouvante du nageur, fréquente les côtes ; les souffleurs ne se montrent que très rarement dans ces parages. Les huîtres des environs de Port-Louis sont renommées et peuvent soutenir la comparaison avec les espèces les plus délicates d’Europe. Les tortues de mer, autrefois très nombreuses, ont disparu comme à Bourbon.

Le climat de l’île Maurice est celui de toutes les contrées tropicales. L’année est divisée en deux saisons bien tranchées : l’une, l’été,, connue sous le nom d’hivernage, de novembre à avril ; l’autre, l’hiver, d’avril à novembre. Les saisons sont inverses des nôtres à cause du changement d’hémisphère. C’est pendant les premiers mois de l’hivernage qu’ont lieu ces pluies torrentielles, souvent continues, particulières aux pays tropicaux ; c’est aussi pendant cette époque qu’éclatent à Maurice les coups de vent, les ouragans, les cyclones, qui fort heureusement ne sèment leurs ravages que sur trois mers du globe, la mer des Indes, celle de Chine et celle des Antilles. Aujourd’hui, grâce aux beaux travaux du capitaine anglais Piddington, président de la cour de marine à Calcutta, la marche des ouragans est connue, et la courbe qu’ils décrivent peut être toujours tracée avec une régularité mathématique : de là le nom de cyclones qu’on leur a donné à cause de leur direction curviligne. Le baromètre indique d’ailleurs avec une très grande précision la venue prochaine d’un cyclone. Le signal d’alarme est alors donné, et au coup de canon officiel des navires en rade doivent prendre toutes les précautions d’usage. À Bourbon, où aucun port n’existe encore, où aucune rade n’est sûre, tous des navires sont tenus de gagner le large des que l’ouragan s’annonce. On a vu ainsi des bâtimens qui ne sont jamais revenus, et d’autres qui ont dû emporter les curieux qui étaient montés pour les visiter jusque sur les rives de Madagascar. L’époque de d’apparition des ouragans est irrégulière, et souvent bien des années se passent sans que le phénomène ait lieu. En revanche il y a souvent plusieurs ouragans dans la même année. Ainsi, au mois de mars 1861, à Maurice, l’île a été deux fois visitée par le fléau, qui a presque épargné La Réunion. Le second ouragan a été terrible : les récoltes ont beaucoup souffert, et le vent a soufflé à Port-Louis avec une si grande violence que des toitures ont été enlevées des maisons même jetées à terre : partout des arbres dénudés ou déracinés couvraient le sol de leurs débris ; mais telle est la vigueur de la végétation tropicale que tout avait repoussé en peu de jours. L’arbre resté débout se présentait plus vert, plus feuillu qu’auparavant, et l’on eût dit-que l’effet de l’ouragan avait été de donner à la vie végétale une nouvelle activité.

Pendant que souffle ce vent dévastateur, que la pluie tombe à torrens,