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manières. Il ne semble pas que le fer ait été exploité à Chypre, quoiqu’il y soit fort commun. Ceci confirmerait l’opinion, généralement reçue, que le fer a été travaillé longtemps après le cuivre.

Les métaux n’ont pas été ici la seule richesse minérale. Les pierres dures des Monts-Olympes furent très recherchées. On sait combien les anciens attachaient de prix a ces sortes de pierres ; la perfection de leurs camées en creux et en relief n’a pas été égalée chez les modernes. Lorsqu’on visite à Rome, à Naples ou à Florence les cabinets des gemmes, on est frappé de la variété des pierres qui ont été employées. Les jaspes de Chypre sont particulièrement remarquables ; ils offriraient des ressources précieuses pour les belles mosaïques en pierre dure que l’on travaille encore à Florence. L’abondance en est extrême ; on en voit de verts, de jaunes et de rouges, dont les teintes sont très éclatantes. Le cristal de roche est commun ; cette substance a été l’objet parmi les anciens d’une supposition si étrange, que les naturalistes d’aujourd’hui peuvent à peine la concevoir : on croyait que le cristal de roche n’était autre chose que de l’eau très fortement glacée. « Il se trouve seulement, écrit Pline, là où la glace condense les neiges de l’hiver ; il est certain que c’est de la glace. » Les auteurs ont signalé à Chypre l’agate, le sangenon et le pœderos (amour des enfans). D’après leurs descriptions, on ne peut guère douter que ces deux dernières substances ne fussent des opales. Un minéral a porté dans l’antiquité le nom de diamant de Chypre ; les voyageurs modernes ont cru que c’était du cristal de roche très pur, et ceci n’est pas admissible, car les anciens, qui ont connu très exactement la forme des cristaux de quartz, n’ont pu confondre ces cristaux avec ceux du diamant, qui sont complètement différens. J’ai trouvé un minéral nommé analcime, qui est translucide et disposé en cristaux d’une grande beauté et du même système que ceux du diamant. C’est probablement à cette substance qu’on a appliqué le nom de diamant de Chypre. Ceci est d’autant plus croyable qu’Etienne de Lusignan a indiqué le gisement de ces diamans dans le lieu même où j’ai recueilli les plus beaux cristaux d’analcime. Les anciens et les modernes ont parlé des émeraudes de Chypre ; mais il est présumable que la plupart de ces émeraudes ne sont que des minéraux cuivreux ou des quartz colorés en vert. En effet, Pline décrit des émeraudes « longues de quatre et même de dix coudées. » Jamais on n’a vu une de ces pierres approcher d’une pareille taille. Pline nous raconte encore qu’à Chypre, « sur le tombeau du roi Hermias, à côté de pêcheries, se trouvait un lion de marbre dont les yeux étaient deux émeraudes. Le feu qu’elles jetaient pénétrait les flots de telle sorte que les thons épouvantés s’enfuyaient. Longtemps les pêcheurs s’étonnèrent de ce fait ; enfin ils