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dit à ce sujet le juge Story, l’une des grandes autorités constitutionnelles de l’Amérique, se réunirent dans les divers états ; mais où ailleurs pouvaient-ils se réunir ? »

Nous venons d’exposer les idées du nord sur la question constitutionnelle ; voici maintenant les théories du sud. Les partisans de la sécession font valoir que les états ont existé avant l’adoption de la constitution, qu’ils formèrent alors un contrat qui ne convient plus aujourd’hui à quelques-uns d’entre eux, et que ceux-ci peuvent demander la dissolution du pacte initial. Ils oublient que si les états ont existé avant l’Union, ils ont cessé d’exister en devenant les États-Unis, du moins en qualité de souverains. Ils oublient encore que cette antériorité chronologique n’est vraie que pour les treize états existant à la fin du dernier siècle, et ne s’aperçoivent pas qu’on ne peut appliquer cet argument aux vingt états qui depuis l’établissement de l’union ont été fondés avec le consentement du pouvoir central. « De nouveaux états, lit-on dans le pacte fédéral, peuvent être admis par le congrès dans cette union. » Les états nouveaux n’y sont donc pas entrés en souverains qui s’unissent à d’autres souverains, ils ont été admis, ils ont sollicité leur admission. Coïncidence étrange ! parmi les états sécessionistes actuels, l’on compte la Virginie, qui précisément a fait les premiers efforts pour relever les treize états primitifs de la ruine et de l’abaissement en les consolidant par l’union. Qui d’ailleurs s’est montré plus ardent que les sécessionistes actuels à provoquer l’adjonction de nouveaux états, par conséquent à préconiser les conquêtes, les annexions, et jusqu’aux aventureuses expéditions des flibustiers ? Qui a toujours été prêt, pour augmenter le territoire, à disposer des forces et du prestige de l’Union entière, à engager le drapeau national, à disposer des ressources de la confédération ? À part les treize états primitifs, tous les autres ont été formés dans des pays appartenant à la confédération, conquis par ses armes, achetés avec ses deniers, obtenus par ses traités ; comme territoires, ils ont reçu du président leurs gouverneurs et leurs juges ; comme états, ils n’ont obtenu l’honneur d’être représentés dans les conseils de la nation qu’à la condition d’être fidèles à la constitution et aux lois. Qui a construit leurs forteresses ? qui a protégé sur toutes les mers le commerce de tous les états ? qui a fait respecter dans tout le monde la liberté du citoyen américain ? « Quel homme, s’écrie éloquemment M. Motley, dans tout le monde civilisé, n’a entendu parler des États-Unis ? Qui pourrait répéter les noms de tous les états particuliers ? Et pourtant, avec un rapide examen de notre histoire et de notre constitution, on parle d’une confédération, d’un contrat, d’une association, du droit d’un état de se retirer à son gré, sans savoir qu’en admettant cette vague phraséologie et ces droits imaginaires, nous violerions