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nages impériaux d’Orient ou d’Occident reposent encore dans leur première sépulture.

Tout d’ailleurs à Ravenne nous fait revivre dans le bas-empire, et si de Saint-Nazaire on entre dans Saint-Vital, qui est tout proche, on se trouve dans un temple octogone bâti par saint Ecclésius sous le règne de Justinien. On a dit que cet édifice, plus que double du précédent, était une imitation de Sainte-Sophie; cependant quelques-uns lui contestent ce caractère byzantin, et Ferguson le place au rang des imitations maladroites du célèbre temple de Minerva medica à Rome. Il est plus certain que Charlemagne l’a pris pour modèle de la chapelle sépulcrale qu’il s’est construite à Aix-la-Chapelle. Huit arceaux décrivent un cercle à l’intérieur. Ils reposent sur des piliers et s’ouvrent au dehors sur des hémicycles à deux étages de légères colonnes, les unes venues de Byzance, les autres qu’on dit gothiques. Cette sorte de tour centrale est surmontée par un dôme ou par une voûte construite en poteries juxtaposées et conservée ainsi jusqu’à nous. A l’exception du beau marbre grec qui revêt certaines parties de murs, il ne faut point parler ici de décorations. Qui croirait que la coupole a été salie, il y a quelque cent ans, par d’infâmes guirlandes de roses dont on ne voudrait pas au foyer de l’Opéra? Mais il règne autour de la construction centrale une large galerie octogone par son enceinte extérieure, sur laquelle s’ouvrent le chœur et des chapelles auxiliaires. Ici se multiplient des ouvrages en mosaïque qu’on ne peut décrire et qui représentent quelquefois avec assez de naturel des scènes de l’Ancien-Testament, choisies comme symboles des mystères de la nouvelle alliance.

Cependant, quelque intérêt qui s’attache à ces œuvres antiques, ce sont des représentations symboliques, générales pour ainsi dire, reproduites sans de grandes différences en divers lieux, en temps divers, et dont les plus anciennes peuvent bien n’être encore que des imitations traditionnelles. Elles nous apprennent comment le siècle où elles sont nées concevait la religion dans l’art; elles ne nous font pas connaître ce temps lui-même. Il n’en est pas ainsi des deux tableaux historiques suspendus aux parois latérales de l’abside de Saint-Vital. D’un côté, le mosaïste a représenté, de grandeur naturelle, l’empereur Justinien entouré de sa cour et de ses gardes. Il porte des présens qu’il offre à l’église, et que vient recevoir saint Maximien et son clergé. En face, la même main sans doute a retracé l’impératrice; un vase précieux à la main, et suivie des dames de son palais, elle marche vers l’entrée d’une église qu’ouvre un chambellan en tirant devant elle un rideau brodé. Les costumes, reproduits avec soin dans leur magnificence et leur singularité, donnent à ces deux scènes la réalité historique. On ne doute pas de la vérité