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bas-reliefs ou des médaillons en l’honneur des professeurs ou des élèves qui ont illustré l’institution; mais ce sont surtout de petits écussons peints, portant les armes, les emblèmes, les noms, l’origine de tous les étudians ou du moins d’un nombre immense d’étudians qui ont reçu là l’enseignement des lettres et des sciences. Cette décoration, remise à neuf, toute fraîche encore et d’un genre très singulier, couvre toutes les murailles. Les salles de l’université, qui sont nombreuses, forment une longue enfilade dans laquelle court une bibliothèque à hauteur d’appui. Au-dessus ce ne sont encore que petits cartouches qui semblent tous armoriés et servent de cadre à des noms d’écoliers. Comme chacune de ces salles était une classe, on montre la place assez élevée où une chaire était implantée au mur, et une grande madone à fresque bien restaurée, qui dominait la chaire, indique encore cette place. L’amphithéâtre d’anatomie est resté dans son état primitif : plafond et parois, tout est revêtu d’une remarquable boiserie qui a conservé sa couleur naturelle. Des sculptures très saillantes et très belles s’y relèvent de toutes parts. Au centre du plafond, une figure en ronde-bosse semble s’en détacher, et les statues des maîtres dans l’art de guérir sont rangées autour de l’amphithéâtre. Hippocrate et Galien n’y pouvaient manquer; mais parmi les modernes les yeux s’arrêtent naturellement sur la statue de Malpighi. Enfin une chapelle, que les arts ont à plaisir enjolivée plutôt qu’embellie par la main de Cesi et du Fiammingo, complète l’ensemble de cet édifice, dont le pareil ou l’analogue serait difficile à rencontrer.

Je lui trouve un grand mérite, c’est d’être fini et soigneusement conservé. En Italie, c’est à noter. Il en est de même du foro de’ mercanti ou de la chambre de commerce, dont la façade à deux étages, chacun de trois arceaux en ogive, est d’un gothique orné si bien tenu qu’il a l’air trop neuf. C’est cependant du gothique du XIIIe siècle, restauré un peu plus tard et décoré de ces briques moulées qu’on appelle en Italie matone. Ce petit édifice plaît d’autant plus qu’il est d’un style qu’on est surpris de trouver là. Les Italiens devaient faire du gothique de fantaisie comme nous faisons quelquefois des maisons à la chinoise ou à la turque.

On ne sait trop si ce n’est pas aussi le caprice qui a autant rapproché ces deux longs prismes quadrangulaires de brique, la tour des Asinelli et la Garisenda. Elles sont presque dénuées de tout ornement, et si hautes et si minces qu’on ne devine pas à quoi elles pouvaient servir. Elles sont inclinées l’une vers l’autre, et la Garisenda s’est écartée de plus de trois mètres de sa ligne d’aplomb. Elle n’est pas la plus haute, et n’a pas les 107 mètres de la tour des Asinelli. On ne doute plus aujourd’hui qu’un tassement, un mouvement de terrain ne soit la cause de ces déviations de la perpendicu-