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sur trois points. À cette nouvelle, le duc de Wellington se contente de donner à ses troupes l’ordre de se concentrer, la gauche (divisions Perponcher et Chassé) à Nivelles, le centre (divisions Clinton et Colville) à Grammont, la droite (divisions Stedmann et Anthing) à Sotteghem, le contingent de Brunswick à Vilvorde, la réserve et la division Picton à Bruxelles. Ces précautions prises, le duc de Wellington se rend au bal de la duchesse de Richmond. Là plusieurs heures se passent dans les fêtes, au milieu de la musique et des danses, soit qu’il ne pût croire à une attaque si impétueuse sur un seul point, soit désir de montrer une sécurité affectée ou réelle.

À minuit arrive la dépêche du général de Doeremberg ; elle annonce positivement que les Français négligent Mons, passent la Sambre, débouchent en masse sur leur extrême droite. Alors seulement la fête fait place à de sérieuses dispositions de guerre. L’armée anglaise reçoit l’ordre de mouvement pour se concentrer aux Quatre-Bras. La division Alton se dirigera de Braine-la-Leud sur Nivelles ; la division Cooke, d’Enghien sur Braine-le-Comte ; les divisions Clinton et Colville, d’Ath, de Grammont et d’Audenarde sur Enghien.

Ainsi, dès le premier jour, le duc de Wellington, ne sachant où attendre l’ennemi, perd treize heures en temporisations ou en ostentations frivoles. N’ayant jamais commandé contre Napoléon, il ne devinait en rien son adversaire ; et ce qui l’avait empêché de se décider plus tôt, c’est l’idée doublement fausse qu’il serait attaqué avant les Prussiens, et qu’il le serait par sa droite. On verra combien cette idée persista chez lui, puisqu’elle se montre encore jusque dans les dispositions préliminaires de la bataille de Waterloo. Cette combinaison fausse eut plusieurs conséquences, dont la perte de treize heures ne fut pas la plus fâcheuse ; mais la grande supériorité du nombre permettait aux généraux ennemis de commettre impunément des fautes. Napoléon, au contraire, ne peut en commettre une seule qui ne lui soit funeste. On dit que le duc de Wellington, malgré tant d’avertissemens, aurait encore tardé à s’ébranler, si le duc de Brunswick, le même qui devait mourir le lendemain glorieusement, ne l’eût arraché au milieu du bal à ses incertitudes. Au lever du jour, c’est-à-dire vingt-quatre heures après le premier mouvement des Français, les troupes autour de Bruxelles quittent enfin leurs cantonnemens. Le général anglais, parti à huit heures du matin, précède son armée aux Quatre-Bras. Dans cette nuit du 15 au 16, Napoléon avait eu son quartier-général à Charleroi, Blücher à Sombref.

Quelques heures ont été perdues par les Français le 15, à l’entrée de la campagne : déjà, comme on l’a vu, on en fait un grave sujet de reproches, même à des absens  ; mais les Anglais ont pris soin par