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et y avait vécu dans l’intimité du jeune Lévesque de Pouilly, qui avait à peu près son âge.

Le rapport de la commission intermédiaire contenait une véritable statistique agricole de la province. Il en résultait que l’étendue totale était de fx millions d’arpens de 51 ares, ce qui correspond assez exactement à ce qu’a depuis donné le cadastre, et que le produit brut pouvait être évalué en tout à 60 millions ou 30 francs par hectare. Les vignes couvraient 100,000 arpens, ou environ 10,000 hectares de moins qu’aujourd’hui. D’immenses quantités de terres incultes ne donnaient aucun produit. Le nombre des chevaux était de 120,000, celui des bêtes à cornes de 250,000, celui des bêtes à laine de 720,000; encore l’hiver rigoureux de 1784 et la disette de fourrage de 1785 avaient-ils réduit ce dernier nombre de près du tiers. Aujourd’hui les quatre départemens champenois possèdent 2 millions de moutons, 400,000 bêtes à cornes, 200,000 chevaux, et la valeur moyenne de ces divers animaux s’est encore plus accrue que la quantité. Un mémoire soumis à l’assemblée par un de ses membres, le M. Leblanc d’Arthur Young, traitait spécialement de l’état des troupeaux et des moyens de l’améliorer. L’auteur avait visité plus de 200 troupeaux sans en trouver un seul uniforme : à côté de moutons valant un louis, il y en avait qui ne valaient pas quatre livres ; ceux-ci donnaient une laine aussi fine que la meilleure de Ségovie, ceux-là ne portaient que de la jarre. Ce n’était évidemment pas à la nature du sol qu’il fallait attribuer ces inégalités, mais au peu de soin des cultivateurs. La France avait eu autrefois la supériorité pour la production des laines; cette industrie était tombée en décadence, mais elle pouvait facilement se relever. M. Leblanc lui-même donnait l’exemple.

La commission avait recueilli des renseignemens non moins précis sur les manufactures. «Nous pouvons, disait le rapport, vous présenter la ville de Reims comme soutenant depuis plus de mille années une des manufactures les plus intéressantes du royaume par le nombre et la diversité des étoffes qui s’y fabriquent. En ne jetant les yeux que sur la quantité fabriquée dans le courant de l’année dernière, on trouve 95,000 pièces d’une valeur, exactement calculée, de 11 millions de livres, dont la moitié peut être considérée comme le prix de la main d’œuvre. Ces étoffes passent en Espagne, en Portugal, en Italie, dans le Levant, et y soutiennent la concurrence avec celles des Anglais. On emploie pour les faire un quart de laine d’Espagne, les trois autres quarts sont tirés du royaume. Trente mille personnes, tant dans Reims que dans la campagne qui l’environne, sont occupées à ce travail. » Suivent des détails du même genre sur les fabriques de Troyes, de Rethel, de Châlons, de