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du Caucase, c’est-à-dire autour du bassin central et de la mer des steppes, les températures sont extrêmes[1]. En été, la chaleur est redoutable ; en hiver, les eaux sont ridées par le souffle de l’Océan-Glacial, qui parcourt librement toutes les plaines de la Russie, tandis que l’énorme muraille du Caucase arrête au passage les vents chauds du sud et du sud-ouest. Cette même chaîne sert de rempart protecteur au bassin méridional, et détourne en grande partie le cours des vents glacés du nord. Ceux qui continuent à se diriger vers le fond du golfe rencontrent en chemin les vents contraires venus des plateaux du Khorassan. Il en résulte un conflit qui neutralise les extrêmes de température et force l’atmosphère à livrer les torrens d’humidité qu’elle renferme. Ainsi les rivages persans de la Caspienne sont à la fois garantis des rigueurs du froid et abondamment arrosés par les pluies du ciel. Leur végétation offre un merveilleux contraste avec celle des steppes d’Astrakhan, où l’on ne peut cultiver la vigne qu’à la condition d’enterrer les ceps à 1 mètre et demi de prolbndem’pendant toute la durée de l’hiver.

La salure des eaux est très inégale dans les diverses parties de la Caspienne. Au nord de la péninsule d’Agrakhan, le Terek, l’Oural et surtout le Volga apportent à la mer une énorme quantité d’eau douce, si bien que la salure totale est seulement de 15 à 16 dix-millièmes, et que, dans plusieurs stations de poste où manquent les sources, on boit l’eau de la mer sans répugnance et sans danger. Entre l’embouchure du Volga et celle de l’Oural, l’eau est à peu près douce tout le long des rivages, tant que la sonde n’a pas atteint 4 mètres de profondeur. Les deux bassins du centre et du midi renferment au contraire une eau tout à fait salée. Ce contraste a donné lieu à d’incessantes discussions, depuis Pline et Quinte-Curce jusqu’à M. Hommaire de Hell. M. de Baer, au lieu d’ajouter une opinion de plus à tant de vaines opinions, a tranché la question par des expériences directes. Il a puisé de l’eau dans toutes les parties de la Caspienne, près des bouches du Volga, au milieu du bassin central, dans les golfes de la côte orientale, non loin d’Asterabad, puis il a dosé la quantité de sel contenue dans les divers échantillons. C’est près du haut promontoire de Tchuk-Karaghan, sur la côte orientale, que M. de Baer croit avoir trouvé le degré de salure moyenne. À côté du cap, en effet, passe un courant assez rapide dans lequel sont parfaitement mélangées les eaux du bassin central et celles de la mer des steppes. Le sel marin contenu dans ce courant ne dépasse pas 9 millièmes : c’est une salure deux fois moindre que celle des eaux de l’Océan-Atlantique.

  1. L’écart est d’environ 80 degrés, de + 40 à — 40. En l’année 1840, M. Platon de Tchihatchef constata un froid de — 43°7 sous le 47e degré de latitude.