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formel et public de ne jamais revenir à l’emprunt que par nécessité ou du moins par la certitude d’un grand bien, vouant à l’indignation de ses concitoyens tout administrateur qui proposerait des emprunts pour des dépenses d’un luxe inutile ; c’est à bannir la misère et à introduire l’aisance et la richesse qu’il faut réserver ce moyen, dont les dangers naissent précisément des facilités qu’il présente. »

Au volume des procès-verbaux de 1784 est joint un grand rapport de M. de Richeprey sur le cadastre. Au nombre des questions que touche cet excellent travail, se trouve celle des poids et mesures. Tout le monde voulait l’uniformité des poids et mesures, le gouvernement tout le premier, et l’assemblée s’en était déjà occupée à plusieurs reprises. M. de Richeprey avait dressé un tableau de réduction des mesures locales en mesures de Paris qui fut imprimé et répandu dans toute la province. L’idée qui a servi plus tard de base au système métrique était déjà connue et discutée, mais on n’avait pas bru devoir l’adopter. « Vous n’ignorez pas, disait M. de Richeprey, que la longueur du double pendule sous l’équateur aurait procuré un terme de réduction invariable, qui, existant dans la nature même, n’aurait eu aucun des inconvéniens des mesures de Paris ; mais vous avez considéré que la réduction à la longueur du double pendule proposée par les personnes les plus savantes du royaume et projetée par d’habiles ministres, n’ayant été exécutée nulle part, n’aurait peut-être pas été accueillie par le grand nombre, qui ne se décide que d’après l’usage, et dont la confiance est nécessaire pour le succès d’une administration qui ne veut même pas que la manière de faire le bien excite des inquiétudes. La réduction aux mesures de Paris, plus généralement connues, plus en usage que d’autres, concourra plus facilement aux vues du gouvernement. »

Le cadastre de 1669 se divisait en unités arbitraires appelées feux, dont chacune se subdivisait en cent bellugues ou étincelles. Aucune réglé générale n’avait présidé à cette répartition. On ne savait pas exactement ce que représentait un feu, pas plus que ce qu’était au juste la livre d’allivrement, divisée elle-même en sols et deniers, qui servait au calcul de l’impôt. Il en résultait que certaines communes payaient pour la taille le tiers de leur produit net, tandis que d’autres ne payaient que le douzième. Cette criante inégalité allait disparaître.

Dans la Haute-Guienne comme en Languedoc, l’exemption de taille ne portait pas sur les personnes, mais sur les biens. Les nobles possesseurs de biens non nobles payaient la taille, et les roturiers possesseurs de biens nobles ne la payaient pas. Il importait donc de bien constater les terres véritablement exemptes, et tout un système de recherche avait été organisé pour en réduire le nombre autant