Page:Revue des Deux Mondes - 1861 - tome 33.djvu/81

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Maria et à Sant’Angelo,. avaient tenté de s’emparer du palais de Caserte. À cette nouvelle, Garibaldi donna ordre aux carabiniers génois, à deux cents hommes de Spangaro et aux volontaires calabrais d’être sur pied à deux heures du matin. Ces troupes étaient les seules qu’il eût sous la main ; les autres gardaient la longue ligne avancée qu’on avait prise dans la journée. De son côté, le chef de l’état-major, le général Sirtori, réunissant toutes les forces qui n’étaient point indispensables pour conserver nos positions, devait marcher sur Caserte par la grand’route ; il emmena avec lui la compagnie suisse de la brigade Eber et une partie de la brigade Amanti (de la division Cosenz). Bixio, prévenu, envoya dès l’aube une colonne qui, se glissant par les rampes de Montecaro, devait attaquer Caserta-Vecchia. Enfin Garibaldi expédia par le télégraphe à deux compagnies de bersaglieri et à deux compagnies d’infanterie de l’armée piémontaise qui se trouvaient à Naples l’ordre de se rendre en chemin de fer, avant le jour, à Caserte. C’est donc le 2 octobre, et non point le 1er, que les Piémontais sont intervenus dans nos affaires, ce qui constitue une différence essentielle. Telle est la vérité, il n’y en a point d’autre ; comme le pigeon de La Fontaine, je puis dire : J’étais là !

Le 2, au point du jour, les royaux firent descendre deux bataillons vers la ville de Caserte. Le général Sirtori réunit promptement les forces qu’il avait sous la main, entre autres les bersaglieri et les deux compagnies de ligne des troupes piémontaises que le chemin de fer venait d’amener, et marcha aux Napolitains, qui s’enfuirent vers Maddaloni, où Bixio tomba sur eux. Garibaldi avait tourné la montagne par San-Leucio. Toutes nos autres forces furent lancées contre l’ennemi, qui se fit pendant quelque temps donner la chasse, et ne tarda pas à mettre bas les armes. Ce succès complétait celui de la veille ; nous avions pris quatorze canons et fait environ cinq mille huit cents prisonniers.

Je vis arriver à Naples la plupart de ces malheureux, et je fus témoin de leur stupéfaction quand ils trouvèrent les forts aux mains de la garde nationale. On leur avait dit et ils étaient persuadés que les Autrichiens occupaient les forteresses. Avant la bataille du Vulturne, ils pensaient n’avoir qu’à passer à travers l’armée de Garibaldi pour se joindre aux impériaux et marcher ensuite avec ceux-ci contre les Piémontais. En entrant au fort Saint-Elme, ils n’en croyaient pas leurs yeux ; quelques-uns pleurèrent : a Ah ! disaient-ils, comme on nous a menti ! Si nous avions su ! » Ceux qui commandaient la ville eurent confiance dans la population napolitaine ; ils eurent tort. Les prisonniers furent insultés ; on leur mettait le poing sous le nez, on leur cracha dans le dos, on leur aboya des injures