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Beethoven, cette énigme léguée à l’avenir par son vaste et puissant génie, elle a atteint le but qu’elle se proposait il y a onze ans. Nous savons maintenant à quoi nous en tenir, et, grâce aux efforts persévérans de MM. Maurin, Chevillard, et de leurs associés, les dernières œuvres de Beethoven ne renferment plus de mystères pour nous. à la quatrième séance qu’ils ont donnée cette année, j’ai entendu le quatuor en si bémol (opéra 130) de Beethoven, dont certaines parties sont plus que contestables, tandis que la cavatine est une inspiration de premier ordre, qui n’a besoin d’aucun commentaire pour être comprise et sentie. La grande sonate pour piano (opéra 111) du même maître a été exécutée avec un grand talent par M. Ritter, dont le nom et la réputation commencent à prendre de la consistance. La séance s’est terminée par le onzième quatuor en fa mineur de Beethoven, sur le mérite duquel je me permets aussi de faire des réserves. La cinquième séance, qui a eu lieu le 14 mars, a été particulièrement remarquable par l’exécution brillante du quinzième quatuor en la mineur de Beethoven. Cette œuvre, composée d’une introduction énigmatique, d’un allegro, d’un adagio admirable, d’un récitatif pathétique et du finale, est un résumé des qualités supérieures et des défaillances qui caractérisent les dernières compositions de ce maître. On a clos la séance par le septième quatuor de Mozart, qui ne contient que de l’or pur, qui vous émeut, vous attendrit, et vous charme toujours de sa grâce divine. Le public distingué et les artistes qui suivent les séances très intéressantes de MM. Maurin et Chevillard leur doivent bien de la reconnaissance pour la lumière qu’ils répandent chaque année sur l’œuvre étonnante du plus grand génie de la musique instrumentale.

MM. Armingaud et Léon Jacquard continuent aussi leur louable entreprise, et les séances de quatuors qu’ils donnent depuis six ans sont toujours fort appréciées du public distingué qui les fréquente. à la première soirée, qui a été donnée le 23 janvier, j’ai particulièrement goûté le grand trio, pour piano, violon et violoncelle, de Beethoven, dont l’andante est une inspiration grandiose. M. Lubeck en a rendu la partie de piano avec un sentiment et une netteté de touche fort remarquables. Je passe sous silence des fragmens d’une sonate de Schumann pour piano et violon, et je m’arrête sur le quintette pour instrumens à cordes de Beethoven, qui a été exécuté avec beaucoup d’ensemble et de soin. La troisième séance, où M. Lubeck a exécuté, avec un peu de recherche peut-être, la sonate pour piano (opéra 33) de Beethoven, s’est terminée par le quintette en la pour instrumens à cordes de Mendelssohn, qui est avec Schumann un des maîtres préférés par MM. Armingaud et Léon Jacquard. À la cinquième séance, ils ont encore exécuté un quatuor de Schumann, pour piano, violon, alto et violoncelle, qui n’a fait que me confirmer dans l’opinion où je suis que Schumann est un compositeur surfait par les sectateurs de la nouvelle école germanique, les Teutons purs. Quoi qu’il en soit, les séances de MM. Armingaud et Léon Jacquard, qui se donnent devant une bonne fraction de la société du faubourg Saint-Germain, sont très intéressantes, très variées, et