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LES
CHEMINS DE FER ESPAGNOLS
ET
LA TRAVERSÉE DES PYRÉNÉES

Au milieu des luttes qui ont agité l’Europe dans ces dernières années et qui la menacent encore dans l’avenir, l’Espagne a procédé avec une rare énergie au développement de ses intérêts matériels. De la Catalogne à l’Andalousie, de la Galice à Valence, dans les Asturies, les Castilles, l’Estramadure, partout se manifeste depuis quelques années une activité singulière. Chaque province, chaque ville même a voulu avoir son chemin de fer ; mais la réunion des capitaux, l’exécution de travaux gigantesques, la nécessité d’aller chercher au dehors un immense matériel imposent des délais inévitables. Quatorze années se sont écoulées à peine depuis l’époque où s’inauguraient (le 4 mai 1846) les travaux de la première grande ligne espagnole, et déjà la locomotive parcourt plus de 1,900 kilomètres sur près de 5,000 qui ont été concédés. Sans doute c’est encore peu. Que l’on se souvienne pourtant de la crise terrible qui venait de remuer ce peuple ; lorsque toutes les passions l’agitaient encore, est-il étonnant que le mouvement n’ait pas été plus rapide ? C’est aux conditions économiques et topographiques de la Péninsule que les chemins de fer durent leurs premiers retards : il faut bien le dire, ces conditions n’avaient rien de séduisant à l’époque où les voies ferrées commençaient à s’établir et où les montagnes semblaient opposer un obstacle insurmontable à de pareils moyens de transport. Lorsque l’on considère la carte de la péninsule ibérique, on dirait que la nature s’est plu à la morceler en diverses régions offrant entre