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La forêt a disparu en partie, mais ce qui en reste suffit pour alimenter un commerce considérable. Le transport se fait par les fleuves, au moyen de radeaux qui descendent jusqu’aux ports d’où ils sont expédiés en Europe. C’est des états de l’ouest, les moins peuplés encore, que vient la plus grande partie de ces bois, dont Chicago est l’entrepôt général. Située sur le lac Michigan, cette ville communique par des lacs et des canaux, d’un côté avec le Saint-Laurent, de l’autre avec l’Hudson, et peut envoyer sans transbordement les trains soit à Québec, soit à New-York.

Jusqu’à présent la France a tiré peu de bois du Canada. Cependant, plus encore que les États-Unis, le Canada est une contrée de forêts. Sur quarante mille lieues carrées qui en forment la superficielle dixième à peine est livré à la culture, le surplus est complètement boisé. En fleuve immense, le Saint-Laurent, traverse le pays dans toute sa largeur, formant une immense vallée, limitée par la chaîne des Laurentides et celle des Apalaches. Ce fleuve, qui sort du lac Ontario, peut être remonté par les plus forts bâtimens jusqu’à Québec, à cent cinquante lieues de son embouchure ; il reçoit dans son cours de nombreuses rivières, presque toutes canalisées, qui amènent des bois des points les plus reculés. L’exploitation des forêts et tes différentes industries qui en dépendent n’occupent pas moins de trois mille entrepreneurs et vingt mille ouvriers bûcherons et flotteurs. Les essences qu’on y trouve sont le chêne, l’érable, le noyer, le charme, l’orme, le frêne, le pin, le sapin et un arbre particulièrement propre aux constructions navales, connu sous le nom d’épinette rouge ou tamarac, dont le bois est à peu près incorruptible. Tous ces arbres, qui croissent en massifs serrés, atteignent de grandes dimensions, et il n’est pas rare de rencontrer des pins pouvant fournir des mâts d’une seule pièce pour des navires de 2,000 tonneaux. Grâce aux cours d’eau, les bois arrivent à Québec à très peu de frais, et donnent lieu à une exportation qui s’élève annuellement à plus de 50 millions de francs. Ce chiffre ne comprend que les bois bruts, et pour avoir une juste idée de ce commerce, il faut y ajouter ceux qui sont transformés en charbon ou en potasse et ceux qui sont devenus des navires, car Québec est déjà maintenant un des plus grands chantiers de constructions navales du monde. Le commerce des bois n’y est pas tout à fait abandonné à lui-même, et le gouvernement colonial exerce une certaine surveillance par l’intermédiaire d’inspecteurs spéciaux chargés de contrôler la qualité et les dimensions des pièces ; Celles-ci sont classées par catégories et marquées d’une lettre particulière ; celles qui ne sont pas jugées assez bonnes sont mises au rebut. Notre consul à Québec, M. Gauldrée-Boilleau, a récemment adressé au gouvernement