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un des officiers de White-Hall qui, le 4 janvier, avait montré le plus d’insolence, puis de chasser ignominieusement un messager que le gouverneur de la Tour, sir John Biron, avait cru pouvoir envoyer, au lieu de se présenter lui-même, pour s’enquérir des griefs qu’on avait contre lui, et dont il demandait à se justifier. Vous voyez à quel point l’autorité du parlement avait grandi dans ces journées, et en quelle altitude étaient devant lui les principaux agens du pouvoir royal.

Le roi lui-même, averti d’heure en heure par ses fidèles de tout ce qui se passait, sentait une agitation extrême succéder à l’incrédulité dédaigneuse avec laquelle il avait accueilli les premières nouvelles de la journée. Quand la triste vérité lui apparut, quand il s’assura qu’un triomphe éclatant allait saluer le lendemain, sans qu’il pût l’empêcher, les cinq « traîtres » qu’il avait publiquement flétris et voulu traîner à l’échafaud, l’indignation et la crainte lui firent prendre une résolution soudaine. Ce même lundi, sur les quatre heures du soir, au moment où le comité allait se dissoudre, il monta dans un carrosse avec la reine et leurs enfans, et après avoir fait appeler à la portière, pour le remercier de ses services, le capitaine des trained bands qui depuis deux mois commandait la garde du palais, il se fit conduire à Hampton-Court. En ceci, je crois qu’il fit bien. Le roi Charles ne pouvait guère assister décemment à l’entrée triomphale du roi Pym.

Vous savez avec quelle pompe a eu lieu, le 11 janvier, cette cérémonie. Sur l’un des bords de la Tamise étaient rangées les milices de la Cité, sur l’autre les trained bands de Southwark. Tous ces miliciens avaient, qui au chapeau, qui au bout de sa pique ou de sa hallebarde, des exemplaires de la protestation. La rivière elle-même était comme couverte de chaloupes et de batelets armés d’où partaient sans cesse des volées de mousqueterie et des salves de canons. Les compagnies de la Cité avaient mis la plus vaste et la plus richement décorée de leurs barges à la disposition des cinq membres, qui s’embarquèrent au lieu dit « des Trois-Grues » pour rentrer à Westminster. Des applaudissemens comme j’en ai peu entendu de ma vie saluèrent ces personnages au moment où ils mirent le pied sur le rivage, au bas des degrés du palais. Le président et la chambre les attendaient debout, et, un instant après qu’ils eurent repris leurs sièges accoutumés, tous les cinq se levèrent. MM. Hampden, Hollis, Haselrig et Strode demeurèrent en silence, et la tête nue, pendant que M. Pym remerciait en leur nom tous les bons citoyens de Londres, ajoutant « qu’après les services rendus par la Cité au parlement, il était de l’honneur de la chambre de protéger désormais les citizens contre toutes les conséquences possibles du