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troubler pour de tels actes serait déclaré ennemi de la chose publique. » Puis, — comme durant le vote le bruit s’était répandu qu’un bateau chargé d’armes et arrivant de Berwick venait d’être signalé près de la Tour, — le comité manda devant lui le gouverneur (sir John Biron) et le lieutenant de l’artillerie, lesquels ayant été examinés, on décida que des mesures immédiates seraient prises pour assurer la garde de la forteresse, qui serait remise à un officier possédant la confiance de la Cité aussi bien que celle du parlement. L’officier choisi fut un capitaine du parc d’artillerie nommé Skippon. Il a servi quelque temps en Hollande : c’est un homme de mœurs réglées, et qui, d’abord simple soldat, s’est élevé au grade qu’il occupe par le seul fait de son mérite. Je le connais un peu, et vous prédis que, si les événemens lui donnent un rôle important, vous le verrez s’élever encore. Nommé par le comité sergent-major-général de la Cité de Londres, il a une véritable armée sous ses ordres. Quant à la charge en elle-même, elle est de création nouvelle, et personne n’eût pensé, il y a seulement quelques jours, que la chambre des communes pût disposer en faveur de qui bon lui semblerait, et sans le consentement du prince, d’une pareille autorité militaire ; mais les nouveautés se suivent et pour ainsi dire s’engendrent l’une l’autre. Après avoir franchi ce pas, le comité, sans avoir encore conscience de tout le pouvoir que lui donnait l’assentiment populaire, mais agissant avec cette vigueur qu’on puise dans les dangers une fois affrontés, notifiait aux sheriffs de Londres et du Middlesex « qu’ils eussent à lever le posse comitatus, » c’est-à-dire tous les citoyens en état de porter les armes pour la garde du roi et de son parlement, à l’occasion de la rentrée de ce dernier en ses salles de Westminster, solennellement annoncée pour le mardi 11. Au moment où, après ces décisions si graves, le comité allait s’ajourner, un message, à coup sûr inattendu, vint mettre sa constance à l’épreuve. Le roi faisait annoncer qu’il se proposait de venir, le lundi suivant, siéger au comité en compagnie de quelques membres de la chambre haute. C’était là sans doute une menace couverte, qui avait pour objet d’empêcher le retour des cinq membres accusés et d’annuler ainsi le vote qui les rappelait expressément ; mais le message royal fut accueilli avec un calme et une courtoisie admirables. « Sa majesté n’avait qu’à venir, répondirent les organes du comité ; elle aurait l’accueil dû à son rang, et pour lui montrer l’estime en laquelle sa visite était tenue, on ne marchanderait pas les préparatifs. En conséquence les capitaines des trained bands de la Cité, commis à la garde du parlement, recevraient ordre de veiller à ce que le roi et sa fidèle noblesse trouvassent les routes libres… » Si je vous disais maintenant, madame, que milady Carlisle inspira cette merveilleuse