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contre le roi. Cependant bon nombre de membres déclaraient vouloir s’abstenir d’aller à Guild-Hall pour ne pas être entraînés à des mesures extrêmes : on annonçait que les accusés viendraient y siéger ; on croyait que le roi les y enverrait ou les y viendrait saisir, et les esprits timorés ne se souciaient point d’avoir à prendre parti dans cette lutte ouverte des deux pouvoirs.

La, séance du 6 janvier se tint dans la chambre où les jurés se retirent pour délibérer. Les membres du comité avaient été reçus par le conseil municipal (common council) en robes et chaînes de cérémonie. La garde était composée de quelques-uns des plus riches bourgeois, chacun revêtu d’une casaque ornée de rubans aux couleurs de sa compagnie particulière et accompagné de son laquais en livrée. De plus, la vieille hospitalité de la Cité avait magnifiquement pourvu à ce que les députés reçus à Guild-Hall n’y souffrissent ni la faim ni la soif, et vers une heure, quand les membres du comité voulurent se séparer pour aller dîner, on les avertit qu’un splendide repas les attendait. Quant aux affaires sérieuses, elles se traitaient méthodiquement l’une après l’autre. On proclama l’illégalité des diverses mesures adoptées par le roi, des warrants qu’il avait signés. Il fut question d’exiger la production de ces warrants ; mais on y renonça sur les observations de sir Simonds d’Ewes, qui s’appliqua, dans un discours fort bien accueilli, à définir les cas de trahison et la manière de procéder en iceux. Sa conclusion fut « que, les procédures contre les cinq gentlemen étant jusqu’alors entachées d’illégalité, il fallait demander sûreté pour leurs personnes, et les engager à venir siéger dans le parlement jusqu’à ce que, dans le parlement, ils eussent été reconnus coupables du crime qui leur était imputé. » M. Glyn, qui, en l’absence forcée de M. Pym, avait pris le rôle de « meneur, » appuya fortement la motion, et dans sa harangue, dirigée contre les conseillers de sa majesté, signala, sans les nommer quelques membres qui jouaient, au sein de la chambre, le triste rôle d’espions de la cour, semant la méfiance et la discorde entre le roi et les représentans de la nation. Des discours qui vinrent ensuite je ne vous dirai rien, si ce n’est qu’en substance ils blâmaient tous le roi d’être intervenu dans une affaire où il ne pouvait agir en même temps comme juge et comme partie. L’un d’eux rappela même un mot célèbre du juge Markhara au roi Edouard IV, à qui ce magistrat disait un jour : « Dans le cas de trahison, un sujet peut arrêter l’accusé ; mais le roi ne le peut point, car si l’arrestation est illégale, l’accusé n’a aucun moyen de redressement à faire valoir contre le roi. » Le débat s’échauffant, il fut proposé, assez à l’étourdie, de déclarer que « toute charge de trahison portée contre un membre des communes constituait une violation du privilège. » Toutefois des têtes plus sages firent simplement voter par le comité