Page:Revue des Deux Mondes - 1861 - tome 32.djvu/829

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ni se rendre compte de ses œuvres, ni en mesurer la grandeur. Ils porteraient volontiers le trouble dans les peuples pour un intérêt mélangé, si ce n’est pire ; fer et boue comme les pieds de cette effigie où Nabuchodonosor était représenté… » Chacun du reste, même M. Hyde, s’étonnait de trouver tant de sottise et de folie en ces révérends personnages. Le parlement, si grièvement insulté par eux, ne demeura pas longtemps à se venger. Deux heures après la lecture de la pétition des évêques, la chambre des lords la déclarait « une violation (breach) des privilèges fondamentaux et une atteinte à l’existence même des parlemens, » après quoi il y eut conférence des deux chambres, et un député des communes (Glyn) vint à la barre de la chambre haute accuser les évêques signataires « de tentative pour la destruction des parlemens et par conséquent contre les lois fondamentales du royaume… » Le débat ne fut pas long, personne ne prenant fait et cause pour les prélats, pas même le comte de Bristol et son fils, lord Digby, lesquels passent néanmoins pour avoir été les complices de l’archevêque Williams dans toute cette manœuvre. À huit heures du soir, dix sur douze des pétitionnaires furent envoyés à la Tour ; deux seulement, à raison de leur grand âge, furent simplement remis à l’huissier de la verge noire. C’était le 30 décembre dernier, par un rude froid, et les right reverends prisonniers durent terriblement souffler dans leurs doigts ; mais on ne s’en égayait pas moins à leurs dépens, et les méchantes langues se donnaient carrière sur cette aventure qui réunissait dans la même cage l’archevêque d’York et celui de Cantorbéry, Laud et Williams, ces deux rivaux irréconciliables. Même on en fit une sorte de dessin burlesque où le. premier emprisonné des deux (Laud) était représenté comme un de ces canards sauvages dont on se sert pour attirer les autres dans le piège.

Ce même jour, et tandis que les lords expédiaient la besogne de messeigneurs les évêques, M. Pym, — après avoir demandé à l’improviste que les portes des communes fussent fermées, qu’aucun membre ne pût quitter l’assemblée, que même on fît vider les salles extérieures par toute personne non attachée au service de la chambre et clore les fenêtres pour que nul papier ne pût être jeté dans la rue, — M. Pym, dis-je, prononça un discours où il laissa entrevoir, sans les dévoiler entièrement, les dangers qui menaçaient soit quelques membres du parlement, soit le parlement lui-même. Son objet (qu’il eut soin de tenir longtemps en suspens) était de faire inviter les citoyens à former une garde pour veiller à la sûreté de la chambre. Il est à croire que les gens chargés de lui faire accepter l’emploi dont il n’avait pas voulu s’étaient laissés aller à quelques demi-confidences sur les périls prochains que courraient les