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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 mars 1861.

Le curieux épisode de la discussion de l’adresse dans nos assemblées est enfin terminé. Nous n’avons pas lieu de rétracter, après ces longs débats, le jugement que nous portions d’avance sur la stérilité des discussions de l’adresse. L’importance qu’on leur donnait autrefois était un des côtés les plus contestables du régime parlementaire tel qu’on s’était habitué à le pratiquer chez nous depuis la restauration. C’était assurément la formalité parlementaire que les libéraux, dans leurs projets et leurs espérances sur l’avenir, se proposaient le plus expressément d’atténuer et de réduire. Aux yeux de ceux qui aiment le régime parlementaire, le principal défaut de cette formalité, c’est de donner une apparence de raison aux détracteurs des institutions représentatives. Les discussions de l’adresse font en effet une consommation stérile de temps : elles sont le prétexte de débordemens de paroles qui n’aboutissent, pour les affaires, à aucun résultat positif. On peut juger de l’abus de cette prodigue dépense de temps par ce qui vient de se passer. La session est ouverte depuis deux mois : qu’a-t-on fait au sénat et au corps législatif ? On a discuté les adresses.

Nous nous plaindrions vivement, en d’autres circonstances, de tout ce temps perdu ; mais les adresses de 1861 et les manifestations de vie politique auxquelles elles ont donné lieu échappent au reproche général que nous faisons à la pratique habituelle de cette formalité parlementaire. Elles marquent en effet la première heure du réveil de la vie politique, depuis neuf ans endormie en France ; elles sont la première épreuve de l’expérience politique dont le décret du 24 novembre a donné le signal ; elles ont mis les corps qui ont pour fonction de représenter la France en demeure de se prononcer sur les graves questions extérieures qui agitent l’Europe et semblent ouvrir une des plus grandes révolutions que notre civilisation européenne ait encore ressenties. À tous ces points de vue, les discussions de